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samedi 11 septembre 2010

Sur l'Air des Oignons de Sydney Bechet

Tout à l’heure je me suis mis à pleurer. Vous me connaissez, je ne suis pas un gars sensible et il m’en faut une sacrée dose pour m’arracher quelques larmes. Pourquoi cet épanchement soudain dans ce cas ? Est-ce à cause de l’indigence des commentaires de ce blog, lui qui a connu du temps de sa splendeur plus d’une centaine d’échanges par billet ? Ou peut-être est-ce l’émotion suscitée par ce sublime nouveau titre « Ma Caisse » dont le génial Jésou nous a fait don tantôt ? Ou encore le choc dû à nos retrouvailles à l’impasse des clématites fut-il trop intenses pour mon cœur d’artichaut ?

En fait à défaut d’artichaut c’est à cause des oignons. Odile traditionnellement en fin de saison prépare du coulis de tomates pour l’hiver. Une quinzaine de kilos. Une fois cuisinée, sa préparation se réduit à une vingtaine de petits sachets de cinq cents grammes qu’elle étiquette avec amour et place au congélateur afin d’agrémenter nos soirées d’hiver. Depuis une paire d’années je participe à l’opération en pelant et épépinant les tomates. Je m’occupe aussi des oignons.

J’ai essayé plusieurs techniques pour éviter l’irritation des yeux inhérente à cette tache, dont le fameux truc de Valérie, qui s’équipe pour l’occasion d’une paire de lunettes de ski. J’ai essayé aussi cette autre astuce qui consiste à éplucher avec de l’eau dans sa bouche. Bon, vous me connaissez j’ai voulu apporter ma pierre à l’édifice, j’ai remplacé l’eau par divers alcools. Mais je renouvelais trop souvent les gorgées pour évacuer les miasmes et au final ma production en pâtissait, notamment coté régularité : sous l’effet d’une certaine euphorie des tranches étaient épaisses, d’autres squelettiques, à la grande insatisfaction d’Odile.

Finalement j’ai décidé d’abandonner tout artifice et de me colleter sans protection aux oignons. Et je pleure. Pour me consoler je me persuade que ça fait du bien à mes canaux lacrymaux, et que cette purge d’automne ne peut qu’être bénéfique à mes yeux, dont je rappelle leur particularité : Ils sont d’un vert singulier avec de légères touches noisette. Je pense que cette teinte, qu’on rencontre rarement, et constitue une grande partie de ce charme qui fait mon succès auprès des fans et suscite la jalousie de mes pairs, ne peut que bénéficier des ces lavage à l’oignon que j’assimile désormais à un soin oculaire. C’est devenu une de me recettes-beauté !

Je me tâte d’ailleurs pour en faire une chanson, un texte plein de poésie vantant les mérites de cette liliacée au bulbe si généreux et universel dont les premières cultures furent détectées voici cinq mille ans en chine. Cependant Sydney Bechet en a composé une version si parfaite que je ne sais pas trop ce que ma contribution pourrait apporter. Las, il reste un million de sujets à traiter, l’oignon peut attendre !

Cependant ce désir d’écrire sur des choses simple correspond à un infléchissement de notre travail d’écriture, en particulier du mien. Foin de ces textes dénonçant la misère et l’hypocrisie du monde. En ce sens «Ma Caisse » fut un révélateur. Jésou est un être pragmatique, il est en prise directe sur le quotidien et les véritables sujets, ceux qui hantent les esprits du commun des mortels. Le fric, la maison, la voiture, les femmes, le sexe : voila des thèmes d’actualité qui ne peuvent qu’attirer l’attention de notre public. Des phrases simples, courtes, percutantes, frappées au coin du bon sens, facilement mémorisables, sur des arrangements mélodiques qu’on puisse fredonner en se rasant ou en allant bosser, pendant les pubs entre deux interventions de Coach Courbis sur RMC.

C’est dans cet état d’esprit que j’ai retrouvé l’équipe des UFR sur la terrasse d’automne de la bastide des Fabre. Après la conversation à bâtons rompus d’usage autour d’un café servi par Bruno, nous avons regagné l’APR (l’Antre des Possibles Musicaux). Cette salle nous a parue bien grande en l’absence d’Odile, qui a quitté le groupe, et Lololalolo, prise par une soirée littéraire. P. avait apporté une maquette de son arrangement de « Ma Caisse ». Il nous l’a passée sur la sono. Nous avons apprécié sa rythmique un peu décalée, qui a rappelé au Carré celle du « Cochon ». Quant à moi j’ai pensé à un titre de Dominique A.
Le Leader et L’Ultrabassiste ont pris quelques minutes pour travailler la basse puis nous avons démarré. Il noua a fallu trois ou quatre essais pour mordre l’esprit du truc, mais pour une première répète après plus de deux mois d’inactivité nous avons été plutôt satisfaits. Je crois beaucoup à ce titre, très festif à mon sens, pas compliqué, et qui peut s’adapter à l’improvisation des musiciens dans les plages de respiration qu’on peut facilement ménager.

En aparté Jésou m’a communiqué son inquiétude : « J’ai pompé les accords sur un morceau des Status Quo. Ca va peut être se remarquer ? » Je lui ai répondu que je me considérais comme l’auditeur moyen et que je connaissais pas mal de titre des Status Quo, ainsi que leur style, et que sincèrement, à aucun moment « Ma Caisse » ne m’évoquait un plagiat d’un titre des SQ. Par ailleurs on n’utilise pas tant que ça d’accord différents dans le Rock, et forcément des centaines de titres se partagent sensiblement les mêmes accompagnements, ce qui n’empêche pas qu’on puisse toujours faire un tube de plus qui n’ait absolument rien à voir avec le modèle dont on a pompé quelques accords. Et puis en y réfléchissant, les quatre premières notes sur lesquelles je chante « Ah, Ah, Ah, Ah » me rappellent furieusement certains gingles entendus dans des gares ou des aéroports sous la voix des hôtesses invitant les passagers à se présenter à l’embarquement. Peut-être les SQ ont-ils eux-mêmes composé leur morceau auquel Jésou fait référence alors qu’ils s’apprêtaient à monter dans un avion ?…Doit-on verser des royalties au compositeur de la musiquette d’Air France ? Je crois qu’on est tranquille : Parfit ne risque pas de venir réclamer la paternité de notre œuvre !

Pour suivre cette séance de déchiffrage et de mise en place, nous avons passé en revue une partie de notre répertoire, et avons été agréablement surpris : C’était plutôt bon ! Comme le faisaient remarquer P. et Le Carré : c’est un peu comme quand on joue au golf ou au tennis après une période d’inactivité. Les gestes semblent naturels et fluides, on a le sentiment de « passer » tout ce qu’on veut et de jouer comme jamais. La tête n’a pas encore tenté de reprendre les commandes, seul le corps s’exprime. C’est surement ce qui s’est passé, les mauvaises habitudes n’ont pas encore eu le temps de se rappeler à notre souvenir et polluer notre jeu. Mais ne boudons pas notre plaisir, cette séance de rentrée a été bonne, et nous a regonflés à bloc pour une nouvelle saison qui se place ainsi sous les meilleurs auspices.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Y'a une p'tite maquette un peu plus aboutie dans vos boîtes.
P.

Anonyme a dit…

Pour les oignons, il faut les éplucher sous l'eau du robinet....Radical!
SD