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dimanche 24 août 2008

Gazon Maudit !

Arrivés à 20h 56 au Chambon, nous sommes partis vers 18h. Exceptionnellement pour un 15 août, nous rencontrons peu de monde sur l'autoroute. Nous retrouvons sur place les Jean et les Fabre. Il y avait un challenge, c'est pourquoi j'ai très précisément donné l'heure de notre arrivée. Nous avions par téléphone annoncé cette heure affichée par le petit Tom. Un apéro offert à la gargouille en était l'enjeu. Pari gagné ! J'essayais de calculer depuis combien de temps nous renouvelions chaque année ce rendez vous estival. Il semble que notre premier séjour au Chambon dans ce cadre très particulier qui rassemble Colmar et Nîmes remonte à 1990. Ce qui fait de cet opus le dix huitième du genre. Hélas, cette fois-ci, nous ne sommes pas au complet. Vincent Nasica, l'ophtalmique bellâtre calvicieux aux tshirts noirs moulants est en Corse, et manquera donc à l'appel. Nous le déplorons, bien sûr. Nos apéros à la Gargouille n'ont vraiment de sens que lorsque nous sommes tous réunis. Il y a là comme un rituel : nos femmes finissent de faire les courses alors qu'assis devant nos mauresques nous refaisons le monde à la terrasse du café. Quand je dis « refaisons le monde » je dois inclure dans nos échanges philosophiques une fine analyse des représentantes féminines de la population alentours. Et la Prot quand elle se lâche peut vraiment être très mignonne sous son petit foulard bleu.

Signalons un grave traumatisme au doigt de notre Comptable. L'annulaire gauche est fracturé au niveau de la phalangette ses autres doigts bleuis par de multiples hématomes alors que ses genoux, les plus belles parties de son corps aux dire de sa tendre épouse, sont ornés de profondes écorchures rappelant les chutes de notre enfance. Cela handicape terriblement notre Cotorep, qui doit accepter qu'on lui coupe ses aliments afin de se nourrir, et qui devra prêter sa moto à Jésou pour que ce dernier la ramène. Il est intéressant d'ailleurs de narrer les circonstances de l'accident tragique à l'origine de ce désagrément.
Or donc le Baou était parti en ballade VTT avec Laura. Sur les difficiles chemins sillonnant la campagne alentours, il en profitait pour transmettre sa maîtrise de ce sport à sa fille chérie, prodiguant maints conseils afin de la mettre en garde contre les dangers potentiels de leurs véloces machines. Ainsi critiqua-t-il la position de sa progéniture :
-Vois-tu, mon bébé, pour bien descendre, il faut tenir le guidon fermement, se soulever de la selle, et surtout bien relever les fesses. Ce faisant il se retourna vers elle, laissant le vélo décider seul de sa trajectoire et planter sa roue avant dans quelque anfractuosité . Sous les yeux attentifs de sa fille admirative, notre Alain exécuta un magnifique salto piqué avant, suivi d'un superbe vautrage sur les mains et les genoux. Laura pu noter qu'en la circonstance, il avait effectivement les fesses bien relevées !
Alain c'est notre Absalon à nous, et question conseils en tous cas, c'est vraiment la médaille d'or !

Levé vers 10 heures le vendredi, je ne peux que constater l'état déplorable de la météo. Un fin crachin tombe sur la campagne environnante. La température est de 11°. la descente « en ville » s'effectue au ralenti dans les dernières centaines de mètres. Le traditionnel encombrement du 15 août est au rendez-vous. Il est rassurant de pouvoir se raccrocher aux « fondamentaux ».
Le repas de midi est un sommet. Gigot de Haute Loire, flageolets et asparacis crépu. Alain et Valérie ont découvert la veille ce champignon qui ressemble à un chou fleur. Celui-ci fait 50 centimètres de diamètres. Nous mangeons à neuf dessus. Le goût en est aussi fin que celui de la morille. Un régal. Dans l'après midi, la plupart vont crapahuter dans la forêt pour ramasser des girolles. Les enfants partent en vélo, avec dans la tête les sages conseils d'Oncle Alain. Quant à moi je fais une courte sieste avant de prendre le 4*4 pour aller à leur rencontre. Je me régale à prendre les chemins au hasard, jouant du crabot avec bonheur. Je me retrouve au milieu de fougères géantes, puis dans une prairie au milieu de chevaux. C'est magique : les chevaux qui s'approchent du camion, le silence alentours interrompu par les hennissements des bêtes, le bruit étouffé du moteur, rassurant... Je branche la radio, France Musique. C'est Debussy je crois, Prélude à l'Après-midi d'un Faune. Le soleil est bas sur l'horizon, déjà caché par les cimes des arbres. En me penchant à l'extérieur je peux sentir l'odeur de l'herbe mouillée. Je m'allume une cigarette et me laisse envahir par le bonheur de l'instant.

Au retour, je rencontre Jésou, qui rentre seul, en avance sur le reste du groupe (c'est un excellent marcheur). Nous repartons ensemble. Le reste de la soirée est classique. Laura est lovée dans le canapé, je la vois, un stylo et un carnet à la main. Comme c'est mignon me dis-je, une jeune fille en fleur qui écrit dans son journal intime. Le romantisme n'est pas mort. Elle doit coucher ses pensées d'adolescente, ses sentiments les plus intimes, au milieu des petits lapins dessinés, des collages pastels et des citations un peu fleur bleue. Curieux je m'approche, dardant les yeux par dessus son épaule : Elle remplit des grilles de sudoku ! Les filles ne sont plus ce qu'elles étaient.

Samedi est une grosse journée. C'est l'odeur du café qui me réveille. Odile se tient devant moi quand j'ouvre les yeux. A la main elle tient une tasse fumante. Quelle merveilleuse façon de se réveiller. Après le petit dèj. Nous nous mettons en route pour Champclause, après Foumourette. C'est là que depuis presque vingt ans nous allons pêcher la truite. C'est une ferme piscicole. Il y a deux étangs artificiels. On peut louer une canne et acheter des vers de teigne. En ce qui me concerne, je ne suis pas fan de pèche, mais j'aime bien le lieu. On se rappellera mes démêlées avec le matériel, et notamment l'incident de canne qui me valut mon surnom de Mitch. A l'entrée, des oies gardent jalousement la faune aquatique. Alain pèche au lancer malgré son lourd handicap. Vincent préfère la méthode traditionnelle. Toujours est il qu'ils sont bien contents que je sois là pour mettre le ver sur l'hameçon ou décrocher la cuiller et ses redoutables barbes de la gueule béante de la truite fauve. Il paraît que des nageurs imprudents ont été dépecés vivants par ces sales bestioles aux mâchoires redoutables, dans un immonde bouillonnements de sang et d'eau. Mythe ou réalité ? La truite de Foumourette rejoindra sans doute dans l'inconscient collectif la bête du Gévaudan !
Les affaires semblent marcher pour les propriétaires, ils ont bâti une maisonnette en dur sur le bord du lac, à l'endroit où se tenait auparavant une guérite de bois. Nous avons rempli notre contrat : 9 belles truites dont certaines saumonées.

L'après midi nous allons chercher des semence de gazon pour le terrain devant la maison. On prend, sur les conseils du voisin, du raygrass italien. Il est robuste, s'étale bien et résiste au passage des véhicules, même des vrais 4*4 style Pajero. Sylvie ne peut résister aux promotions du jour : un superbe hamac et son support puis des coussins au prix exceptionnel. Sur le retour nous faisons halte chez le charcutier au Mazet, puis au magasin de fromage. Le circuit traditionnel.

Au retour à la maison, on ne sait pas pourquoi, Christian se prend de passion pour le gazon. Il nous serine qu'il faut le planter à tout prix dans l'après midi. Il paraît également que c'est soirée de pleine lune, traditionnellement propice aux plantations. Le terrain devant la ferme est de dimensions honorables : set à huit cents mètres carrés. Nous sommes huit à œuvrer car Laura est prise par d'autres occupations (son carnet intime de sudoku). Naïvement nous espérions qu'il suffirait de balancer les graines et basta. Mais, et là jésou commence à regretter son acharnement, il nous faut d'abord griffer assez profondément le sol, au départ avec deux râteaux dont un pour les feuilles. Autant dire que malgré notre nombre nous ne sommes pas sortis de l'auberge ! Heureusement Gérard le gentil voisin qui a déjà comblé le trou qui est désormais la prairie des Jean, ému, nous passe trois bêches. Nous faisons ça « à la chinoise » en ligne, les uns bêchant, les autres ratissant, ou ôtant les pierres. Odile quant à elle, perfectionniste, balaye consciencieusement le terrain, afin qu'il soit bien propre avant de le travailler. Pour suivre, Gérard nous fait la démo du célèbre « geste auguste du semeur » et « torche l'ensemencement » en un quart d'heure chrono. Les ados apportent leur touche personnelle en passant le lourd rouleau de ciment bricolé par notre voisin. Je dis désormais « notre » voisin car un peu à l'instar de la Foucherie, nous connaissons le voisinage. Gérard bien sur, mais aussi Marcel, le sympathique conducteur de tracteur. C'est très valorisant de sentir accepté, de savoir qu'on fait partie de la communauté, on se sent enfin chez nous. Une fois que nous aurons fait le reste des travaux : construction de l'ascenseur, aménagement des combles, ouverture de deux baies vitrées et achat d'un poêle à bois, puis quelques aménagements extérieurs autour de la future piscine, je pense que nous serons vraiment bien.

Signalons que les UFR, bien que réduits à leur plus basique expression, guitare et voix, ne sont pas restés inactifs. Jésou m'a demandé d'apporter ma guitare sèche. Pour perpétuer la tradition, et en l'absence de Pierrot, Le Barde casse une corde de mi en l'accordant, heureusement la plus grave, ce qui est un peu moins pénalisant. A tour de rôle nous régalons nos amis de nos ballades. Captivés, ils abandonnent toute activité pour nous écouter. A part bien sur Laura, toute à ses sudoku. Cela inquiète d'ailleurs Jésou, il la trouve trop maigre, et estime que la pratique du sudoku peut nuire à son QI. En effet si ce dernier grimpe trop, elle va finir par devenir intelligente. Ce que Le Barde résume en une formules lapidaire: Méfie-toi Laura : Les homme n'aiment que les grosses connes !
Mais pour revenir aux Fossoyeurs, il est évident que l'expression de notre groupe se contente avantageusement d'un guitariste et d'un chanteur ; on gagne en limpidité, en simplicité, et la voix accompagné d'une guitare acoustique exprime mieux l'émotion du chanteur. Et puis pour les cachets, c'est plus facile de calculer. J'ajoute que Jésou me fait écouter sa dernière composition. Il n'ose la présenter au groupe. Je m'insurge contre cette timidité. Dans le concert des artistes, il doit faire entendre sa partition. Tel Georges Harrisson il doit nous offrir un tube.

Le reste du séjour se passe dans le plus grand farniente. Les Fabre nous quittent en début d'après midi le dimanche. Rendez-vous l'année prochaine je l'espère.

mardi 19 août 2008

Les Matins de l'Onde

La voile au vent faseille,
Qui t'entraîne grand largue.
A la mer une bouteille
T'as livré son message.
Sous le sombre soleil,
Tu l'as jetée à la vague.
Au long de ta veille
s'éloignent les rivages
Tu n'es plus l'otage
D'une parole donnée.
Tu as tourné la page,
refermé le livret.
Mais tu gardes la trace,
Par le sel délavée,
D'un souvenir fugace,
A moitié effacé.

Tous les démons du monde
T'attirent et t'entraînent.
Sous un ciel de Sienne,
Tout autour la mer veille,
Infinie et féconde.
Démons et merveilles
Défont puis réveillent,
Dans les matins de l'onde,
Des pensées anciennes,
Suaves appels des sirènes
Au murmure pareils,
qui se mêlent et se fondent
à l'orée du sommeil.
Des heures tu suis la ronde.
Tu choisis la moins vaine
Dont tu gouttes les secondes.

Dans Les matins de l'onde
Infinie et féconde
Les démons du monde
Se mêlent et se fondent

lundi 18 août 2008

"Ou est Ma Jeunesse" selon Poune

Où est ma jeunesse

J'ai pourtant cru à son retour
J'avais sûrement besoin d'amour
Je m'étais dit c'est pour toujours
J'avais oublié qu'y a le compte a r'bour

Où est ma jeunesse

Maintenant quand ça me fait mal
Il me semble que c'est pas normal
En fait j'suis comme un vieux cheval
Va falloir que j'rentre au corral

Où est ma jeunesse

Elle m'a quitté tout doucement
Chaque jour j'suis un peu plus perdant
Quand j'me retourne je vois devant
C'est signe que c'est plus comme avant

Où est ma jeunesse

Il faut dire les choses comme elles sont
Maint'nant les jeunes m'traitent de vieux con
En plus je crains qu'il aient raison
Dans le miroir j' vois mon double menton

Adieu jeunesse

On peut pas suspendre le temps
S'il faut mourir moi j'aime autant
Qu'on dise de moi en rigolant
On l'aimait bien ce grand enfant

vendredi 15 août 2008

Bon Baisers du TGV

C'est pratique le TGV. Assis confortablement dans ma luxueuse place du wagon des premières, je regarde à ma gauche défiler le paysage drômois, légèrement flouté par la vitesse quasi supersonique imprimée par les 6600 kW de la machine. A coté de moi, mes compagnons de voyage somnolent ou tapotent sur leur portable. Le contrôleur est passé entre les sièges, lorsqu'il est arrivé à ma hauteur j'ai fait mine de sortir de ma poche le billet composté, d'un geste rassurant de la main il m'a fait signe de n'en rien faire : « Je vous en prie, pas de cela entre nous ». Le steward vient de me servir un café : « Avec les compliments de la direction des chemins de fer », a-t-il expliqué devant ma mine interrogative. L'ambiance est détendue, feutrée comme il se doit dans ce lieu roulant, bercé imperceptiblement par le bruit des rails. La veille, j'ai retrouvé mes comparses à la SJM. Seul Phil le K manquait à l'appel. Notre batteur est en villégiature dans sa luxueuse propriété des bords du lac Léman. Lolo et Pascou, fraîchement débarqués de Djerba la douce, arborent un bronzage suspect. Ces deux noctambules ont dû mettre les bouchées doubles pour acquérir ce teint ambré propres aux jetsetters. On apprend que les papouillages plus ou moins thérapeutiques furent de règle, prodigués parfois à quatre mains par des indigènes habiles, aux formes harmonieuses et féminines.
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Mais ce soir, exceptionnellement un mardi pour cause de cinéma le lendemain, les mains servent uniquement à taquiner cordes, baguettes et claviers.
A notre arrivés, nous avons eu la surprise de trouver le Kéké. que venait il faire Impasse des Clématites ? Avait-il l'intention de nous narguer, ou bien de nous balancer une de ses perfides méchancetés dont il aime saupoudrer le Blog ? Non, tout simplement il est venu nous apporter des tirages grand format des photos prise dans son studio dentaire du Boulevard Jean Jaurès. En format A3 c'est vraiment somptueux. Nous récoltons enfin les fruits de notre investissement, lorsque nous avons vidés nos poches pour financer l'achat d'une imprimante professionnelle. Hélas il ne reste pas et retourne dans son repaire, son officine d'alchimiste de l'image.

Nous décidons de ne travailler que les morceaux les plus récents. Marre, Bête de Scène, et puis nos premières compos : Ecolo, Protest et Spam. En l'absence du batteur, c'est Pierre qui s'assoit aux drums. Il compense une légère imprécision par une démesure dans le phrasé qui contraste avec la précision mathématique et métronomique du titulaire et perturbe parfois l'exécution des titres. On a tendance à perdre ses repères et manquer des reprises, mais certains délires de notre leader compensent largement ces inconvénients.

L'impression de redécouvrir des morceaux pourtant largement rodés est encore amplifiée par le fait que la guitare solo ayant disparu, ce sont Jésou et Lolo qui suppléent cette absence. Chaque titre prend du coup une coloration plus jazzy pas déplaisante du tout. Lolo, qui pourtant avoue n'avoir travaillé aucun morceau, commence à bien mordre l'esprit de la chose et swingue beaucoup plus ses accompagnements. C'est vraiment très plaisant. D'autant que notre pianiste arbore une petite tunique au décolleté arrondi, immaculée, qui lui dégage gracieusement les épaules et dont la transparence laisse apparaître un soutien-gorge blanc qui met bien en valeur des seins parfaits s'animant avec indolence au rythme de ses gammes. Les yeux mi-clos portés sur le jeu de ses doigts, le visage à demi caché par les boucles brunes de ses cheveux défaits, on la devine concentrée sur sa partie. Un spectacle pour l'oreille et pour les yeux. Pour la première fois elle se laisse aller à des improvisations sur les solos, notamment sur Spam et EcoloSong.

Pour finir la séance, nous reprenons le boogie « Docteur Bonheur ». Nous travaillons longuement dessus. Pascou imprime un tempo d'enfer à la basse, et Pierrot se déchaine avec un bonheur facétieux. Quant à moi je maudis l'abruti qui a écrit les paroles: il faut débiter un texte dense et interminable sur un rythme de TGV.
Odile à son tour manie les baguettes tandis que Pierrot retourne à son instrument de prédilection. Mais il ne s'en tient pas là, sa capacité à nous surprendre encore est intacte. Il sort de sa poche un harmonica et entame un solo digne des meilleurs bluesmen sur des variations de Lolo qui se lache. Ce type est incroyable !

Enfin « Oublie ça » conclut cette répétition, commencée avec un peu d'appréhension dans une cacophonie approximative. Vous en connaissez surement le thème, il s'agit d'un type qui clame sans diplomatie son ras le bol face à une tyrannie domestique supposée. Le texte est franchement misogyne et sans nuances. Il est évident, dans ce contexte très particulier, que les filles n'ont aucunement l'intention de participer de quelconque manière et de cautionner ainsi un titre dont elles rejettent avec dédain chacun des couplets. C'est donc dans un replis sur soi de nos partenaires féminines que nous travaillons ce titre. Toutefois musicalement, çà tient plutôt bien la route. Lolo propose donc à Odile d'écrire un ou deux couplets qui seraient la réponse de la bergère au berger et concluraient le titre au bénéfice des femmes. Pourquoi pas. Nous attendons donc la réponse des féministes à notre provocation. Avant de partir, nous chargeons un peu de matériel dans l'Aigo du Pounet. Mercredi midi, Michel Créach viendra faire le bœuf avec l'Ultrabassiste et la pianiste.

Je viens de faire un décompte rapide, ce sont désormais sept compositions personnelles que nous pouvons proposer à notre public. Deux sont en préparations, et une dizaine encore dans les cartons attendent que Pierrot les porte sur les fonds baptismaux.

Qui a dit que les cinquantenaires manquaient d'énergie ??

lundi 11 août 2008

le Fourbe, La Hyène et le Complice

On ne dira jamais assez la duplicité de notre Pierrot. J'ai laissé quelques jours passer avant d'en narrer un flagrant exemple afin de ne pas me laisser emporter par une ire légitime et vengeresse. Les mots blessent parfois et il faut en manier l'enchaînement avec infiniment de précautions tant il est facile de se faire plaisir au travers d'une prose acérée. D'autant que la voix et ses inflexions ne sont pas là pour en modérer l'impact, alors que les yeux du lecteur sont prompt,eux, à transmettre la sécheresse d'une écriture parfois cryptique qui n'a eu le temps de percoler longuement à travers le filtre sensible de l'interprétation des gestes et signes pour en tempérer les effets sur sa cible.

En bref, voici l'histoire. Contacté samedi dernier par notre infirmier libéral préféré, afin de participer à une grillade festive nocturne, j'en profitai pour excuser mon absence à la répétition du mercredi précédent. Ce qui entre parenthèses en explique l'absence de compte-rendu. Le Leader Maximo se montra conciliant, m'indiquant qu'en la circonstance ils avaient « un peu avancé » dans le travail sur nos dernières compos, en compagnie de Jésou et Phil le K. Il ne se montra pas prolixe, mais laissa entendre que la répétition s'était bien passée. Je me confondis encore en excuses, rampant virtuellement à ses pieds en signe de contrition. Il accepta magnanimement mes balbutiements embarrassés, dans lesquels je parvins péniblement à glisser que cette absence était consécutive à un épuisement général dû à un repas l'avant-veille, mal négocié. Sur ce, j'acceptai l'invitation avec une joie d'autant plus enthousiaste que je mesurai l'ampleur de ma faute et la faveur qui m'était accordée.

C'était jeudi. Je vécu donc deux jours de calvaire, à culpabiliser sur mon absence à la SJM pour cause de sieste alors que mes amis, mes frères, avaient trimés pour la collectivité tout une soirée durant. Je louai silencieusement leur assiduité, je saluai leur abnégation, cherchant avec désespoir quelque moyen de leur manifester ma reconnaissance.

Il se trouve que la veille Françoise avait appelé Odile pour nous inviter à une grillade festive et vespérale (c'est la saison). Mon épouse avait dû décliner l'offre, pour des causes similaires à celles évoquées plus haut.

C'est donc en toute candeur que nous rejoignîmes le groupe chez les Charras, le samedi soir, entre chiens et loups. La soirée était agréable, le température acceptable après plusieurs jours de semi canicule. C'est alors que j'appris, au décours d'une conversation animée et joyeuse, que notre hôte, celui que je nommerai désormais « le Fourbe Charras » ainsi que les Fabre, que je qualifierai de « complices » s'étaient rendus à cette fameuse invitation des Thèvenon du mercredi. Et qu'ils y avaient passé un assez agréable moment, ma fois. Je ne fis pas tout de suite le rapprochement. Je continuai donc à écouter distraitement le récit de leur soirée lorsque soudain l'info se fraya un chemin vers mes centres de la discrimination. Ils firent leur travail de tri parmi toutes les données parasites à type de « conneries de milieu d'apéro » et transmirent à mes ères cognitives un signal d'alerte. Un peu genre la cloche à fin d'un round de boxe, ou la sirène des policiers de la BAC quand ils fondent sur le maghrébin de la cité, accompagnée d'un gyrophare bleu tournant frénétiquement à l'intérieur de mon crâne, dardant des rayons bleus par les pupilles dilatées de mes yeux hagards.

Je me tournai vers Pierrot et m'enquis, suave mais déjà distant :
« Dis-moi, peux tu m'expliquer, immonde scolopendre, comment as tu pu à la fois te goberger au repas des Plagnes et trimer sur les accords de « Oublie-ça » Impasse des Clématites ?
Ubiquité ? Téléportation ? Lévitation transcendantale ? Micro trou noir ?
Je vis son visage se décomposer, le fourbe mettait bas son masque, et ce n'était pas beau à voir ! Son mutisme mâtiné de bégaiements et les maladroites justifications dont il émailla une excuse incompréhensible confirmèrent la justesse de mes doutes.
J'avais été berné, bafoué dans mon honneur, moi qui depuis trois jours portait le poids intenable d'une culpabilité trop lourde.

Ils n'avaient pas répété.

Ajoutons à cette sombre semaine, l'ultime coup de poignard planté dans mon dos par la hyène putride dont les ricanements malodorant accompagnèrent la remise d'un splendide poster au guitariste, ce tigre de papier sournois, le montrant, fier, dédaigneux et narquois, en emblème triomphant des UFR.

Je le savais déjà, mais cela me fut confirmé le lendemain, alors que réitérant son geste de provocation, le sombre lycanthrope offrait un portrait identique à l'autre guitariste du groupe, Le Barde : Il n'y en a que pour les guitaristes ! Les autres membres du groupe sont systématiquement humiliés, ramenés à la portion congrue. Toute occasion est bonne, même l'apéro le plus anodin, pour rabaisser le chanteur, et lui faire sentir combien sa place est précaire dans la formation.

Fort heureusement, la semaine fut sauvée par notre sortie du samedi. A la Guinguette, l'estaminet de Bachevalier le batteur, au milieu de la garrigue nous eûmes le plaisir d'assister au concert d'un trio toulonnais. Rock, funk et blues étaient au rendez-vous, admirablement servis par un couple bass-batt d'exception.

Le chanteur guitaristes légèrement en retrait, mit sur mes plaies un peu de baume. A lui tout seul il renvoyait dos à dos les éternels rivaux.

lundi 4 août 2008

I Have A Dream

Quand j'arrive sur la terrasse de la résidence Fabre, chantonnant joyeusement en cette belle soirée de juillet, tous mes comparses sont déjà attablés. Je n'ai pas le temps de m'assoir que je suis soumis à un feu roulant de commentaires. Je ne comprends pas tout de suite la teneur de leur propos. Tous parlent en même temps, d'une voix excitée, sur un ton de reproche. C'est Pascou qui prend la direction du débat avec une lueur inquisitrice dans le regard :

- Michel, tu n'as toujours pas déposé nos chansons à la SAC ?
- Euh, non, je n'ai pas eu le temps ; mon travail, ma vie de famille, les soucis, les problèmes,tout ça...
- Eh ben c'est bien dommage, parce qu'on s'est fait voler une chanson !
- Comment ça, laquelle ?
- EcoloSong.
- Mais.. qui, quoi, comment, où, oh mon Dieu, ah là là, quel choc, comment t'en est-tu aperçu ?
- Bernard, mon frère avocat et manager putatif du groupe (ça c'est pour les lecteurs occasionnels, histoire de les replacer dans le contexte) est allé voir au Sémaphore le film de Rémi Bezançon, « Le premier jour du reste de ma vie », et il m'a appelé juste après pour nous dire qu'il avait entendu EcoloSong dans la bande son.
Je n'y croyais pas, du coup j'y suis allé moi aussi. Il n'y a aucun doute : même intro à la basse, même tempo.
C'est Sinclair qui a composé la bande originale : c'est lui qui nous a piqué notre chanson.
- Mais comment a-t-elle attéri là ?... Ce doryphore a du tomber par hasard sur le blog, ou sur une de nos vidéos sur Youtube.
- Surement, et maintenant, c'est lui qui va toucher le pactole avec notre travail.
- Tu dis qu'il n'y a pas de doute, il y a toute notre chanson, paroles et musique ?
- Non, il n'y a que l'intro.
- Tu es vraiment sur que c'est notre intro ?
- Je la joue suffisamment souvent pour en être certain.
- Bon, il n'y a pas mort d'homme alors, si c'est juste trois ou quatre notes.
- Mitch, il suffit de quatre notes identiques pour déterminer qu'il y a plagiat, et là, Jésou, on a compté combien de notes ?
- 11.
- 11 notes : C'est un plagiat ! Et on ne peut rien faire parce que tu n'as rien déposé.
- Attends, moi je connais très bien cette loi sur la propriété artistique. Tu n'a pas besoin de déposer une œuvre pour qu'elle soit reconnue comme t'appartenant. Le simple fait de l'avoir écrite ou composée t'en attribue la paternité. Il suffit juste de pouvoir le prouver. Donc on peut attaquer Sinclair en prouvant l'antériorité de l'oeuvre.
- Et comment prouves-tu l'antériorité ?
- Jako, bien sûr ! On a l'enregistrement, tous nos documents, le blog. Sur le blog je commence à parler d'écolosong en mars 2007.
Donc si nous voulons nous défendre nous avons tout ce qu'il faut. Appelle Bernard. On poursuit Sinclair en justice.
- Bah pour 11 notes, vous croyez qu'il faut aller jusque là ?
- Le problème, c'est que ce type a surement déposé la BO du film. Donc cette intro lui appartient maintenant. Quand on voudra jouer EcoloSong, on va devoir payer des droits dessus !
Pour prouver que c'est une œuvre originale, il va nous falloir attaquer Sinclair.
- En attendant, ça nous fait un titre perso en moins, et une reprise de plus ! intervient Phil le K.
- Il va peut être plaider « l'air du temps », ce Bob Sinclair. dire que ce morceau était dans l'air..
- Tu confonds Sinclair, le neveu de Patrice Blanc-Francard, avec Bob Sinclar le DJ pour ados dont le pseudonyme fait référence au personnage de Belmondo dans le Magnifique de Philippe de Broca.
Ouais, bon, Sinclar, Sinclair.... et toi Pierrot, ça t'est venu comment cette intro ? Es-tu sûr que tu ne l'a pas entendue ailleurs ?
- Non, je ne pense pas. Bien sur on ne peut jurer de rien, mais a priori je l'ai composée tout seul.
Alors on attaque, et on demande dix mille euros pour le pressium doloris.
- Chacun.
- Oui, tu as raison, dix mille euros chacun. Avec tout le blé qu'il se fait, il peut casquer ce salaud.
- Bon, on y va ? On a une répète sur le feu..

Sur cette dernière résolution, nous descendons à la SJM, dans une ambiance d'étuve due à la chaleur moite de cette nuit de juillet.
Les femmes ne sont pas là, Lolo est partie en Tunisie, se faire griller sur une plage de tourisme de masse, quelques jours auparavant. Odile reste avec Vincent notre fils, rentré d'un voyage d'étude en Espagne. Nous procédons à un semi-marathon comprenant uniquement nos titres perso, puis nous travaillons Oublie ça, et Docteur Bonheur. Pierrot a revu le refrain de ce dernier, qui en résumé dit : « Docteur, donne-moi du bonheur, sinon, je change de dealer ! » Les choristes nous manquent pour animer un peu les refrains, mais le travail avance bien et nous sommes satisfaits.

C'est la dernière répète avec l'effectif complet des musiciens avant la rentrée, Pascou part pour la Tunisie, puis avec Pierrot, pour New York. A ce propos, L'Ultrabassiste a eu un rêve que nous jugeons prémonitoire.
(fondu ; l'image ondule pour signifier l'ambiance onirique puis se stabilise : On est à New York, comme l'atteste l'arrière plan montrant la 5ème avenue. Des taxis jaunes se mêlent à la circulation, à l'angle d'une rue un vendeur de hot dogs inonde ses sandwiches de ketchup tandis qu'un prêcheur brandissant une bible promet la fin du monde et appelle au repentir).
Les femmes vont faire du shopping, avec l'euro fort, elles peuvent tout se permettre. Pascou et Pierrot décident de visiter un immense magasin de musique. Ils abordent un vendeur,et dans un anglais parfait lui demandent d'essayer les grattes. Il les conduit dans un auditorium, leur présente différents instruments, puis leur propose de jouer une compo des UFR. Il s'exécutent, se prennent au jeu. Ils ne savent pas que l'auditorium sonorise aussi les étages du magasin, et que tout le monde les entend. Bientôt, des gens s'attroupent derrière la vitre du studio, s'interrogent, demandent quel est ce titre. Finalement un mec rentre, leur tend une carte : c'est un producteur, il veut les faire signer. C'est la consécration, mais ils n'oublient pas le reste de l'orchestre et nous font venir les jours suivants au mythique studio d'Atlantic Record qui a signé les plus grands noms du Rock dont Led Zeppelin et les Stones ainsi que AC/DC, pour enregistrer notre premier album professionnel.

Et au final, on baise ce connard de Bob, On est numéro 1 des ventes durant 107 semaines consécutives dans 32 pays y compris l'Afghanistan, mais on ne prend pas la grosse tête pour autant. Nous restons les garçons courtois et humbles que nous avons toujours été.