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samedi 10 avril 2010

Au Bout du Tunnel, Je Vois La Lumiere !

Il y a enregistrement des chœurs ce samedi 9 avril. Je passe prendre Lolo notre pianiste émérite au domicile de la rue Carnot. Dans le couloir et dans les pièces, je suis environné d’un entassement de cartons et de caisses, témoins muets du déménagement imminent des Desimeur pour leur nouvelle demeure, dans quinze jours. Bien sur nous serons de la fête pour vider l’appartement. Désignant le lourd piano dans un coin de la pièce qui me fait face, je questionne un peu anxieux : « Il reste là celui-là » ? « Oui » me répond Lolo. « Ouf pensai-je avec soulagement, un truc lourd de moins à porter ». « D’ailleurs, poursuit Lolo, la table du salon ne bouge pas non plus, ainsi que tout l’électroménager. On laisse tout ça à Thibaud ». La table du salon est de dimension extravagante, et son plateau est constitué de lourdes plaques de pierre sombre. Un âne mort !

Je fais discrètement l’inventaire des meubles restant… Bon, en manoeuvrant bien, je devrais m’en sortir sans trop de dégâts… Je vais essayer de me spécialiser dans le bibelot fragile, le tableau de petite dimension, la revue d’art à l’unité ; je laisserai les travaux de force à Pascou et Jésou. Ces solides gaillards ne feront qu’une bouchée de tout le reste. Et puis il faudra bien un gars spécialisé dans le management des ressources humaines, un type qui sache diriger les équipes pour éviter tout gaspillage de temps, pour rationaliser les gestes et gérer les flux. La gestion des flux c’est primordial dans ce genre d’entreprise, surtout les flux de bières et de pastis, qui on le sait sont le carburant qui booste les énergies et ravivent les coups de mou. Dans ma tête je commence à établir des quantités correctes pour une bande de soiffards quinquagénaire, tout en évaluant les risques d’infarctus, de malaises, d’hypoglycémies ou d’entorses et fractures…

Et surtout il faudra surveiller, traquer, débusquer le tire-au-flanc. Celui qui arrive vers 11 heures, commence par faire le tour du propriétaire, discute ici et là, donne des conseils, critique abondamment la disposition des pièces ou la raideur d’un escalier, puis file droit sur la glacière pour décapsuler sa première bière avant de sortir un peu pour décompresser en fumant une cigarette, et ensuite tenir compagnie au préposé à la grillade, se gaver de merguez, déplorer la lenteur des rotations et l’indécision de la propriétaire sur la destination de la commode de tante jeanne un verre de rosé à la main, avant de lancer à la cantonade, vers 15 heures : « bon, ben ça a bien avancé, c’est sur les rails, je vais y aller parce que là on est trop nombreux, on va se gêner, ça va nuire à la productivité, encore merci à tous, vous êtes formidables, je vous aime ».
Mais Lolo me rappelle à la réalité : « On y va ? »

Pour cette séance nous sommes cinq UFR : Pierrot, Pascou, Lolo, votre serviteur et Catou, nouvelle impétrante choriste. Cette dernière a répété trois fois les morceaux avec Lolo et P. elle est un peu tendue et je comprends son inquiétude. Elle doit pallier au pied levé l’absence d’Odile qui a rempli ce poste durant ces deux dernières années. Bien qu’elle ait écouté souvent notre répertoire, c’est la première fois qu’elle doit l’interpréter, la tache n’est pas aisée. Pour la faire rentrer en douceur dans l’arène, nous choisissons Bête de Scène. Il y a une escalade vocale à plusieurs voix sur quatre note tandis que le chanteur entonne « Mais moi je voudrais bien quand même qu’on me laisse continuer à faire ce que j’aime ». C’est le baptême du feu pour Catou, et ce n’est rien de le dire : la prise va durer une heure et demi !

Chacun d’entre nous choisit une note et nous passons un long moment à harmoniser nos voix. Il faut tenir l’accord durant cinq ou six secondes, mais c’est une éternité pour nous, sans compter qu’il faut, tout simplement, se souvenir dans quelle tonalité on doit chanter ! Ce qui donne lieu, sous le regard désespéré de Jako, à des couacs multiples, des fous rires difficilement réprimés. Nous devons reprendre une quarantaine de fois cette courte phrase vocale avant d’obtenir une relative satisfaction. Et encore Jako devra droper allègrement pour reproduire en plusieurs exemplaires l’unique spécimen correct de nos tentatives. Heureusement Lolo a apporté un cake anglais aux fruits dans lequel nous tranchons pour compenser notre stress !

Jako essaye de me rassurer : « Tu sais Mitch, même les groupes confirmés on des soucis avec leurs chœurs. Ce n’est pas facile. Une bonne choriste ça vaut de l’or. Même, en studio, pour certaines productions il y a un type engagé exprès pour faire les arrangements et diriger les chœurs ».
« Le souci, Jako, c’est que c’est la première fois qu’on chante ce truc à peu près correctement. A aucun moment depuis plus de deux ans qu’on chante Bête de scène, que ce soit en répète ou sur scène, nous ne l’avons chanté aussi bien que ce soir… et je ne suis pas sûr du tout qu’on soit capable de le refaire ! » « Et ben ça sert aussi à ça le studio, tempère l’ingé-son, ça permet de se caler, de s’entendre, de prendre le temps, et de progresser ».

En fait nous nous apercevons que dans l’intention de chauffer les voix, et de mettre Catou en confiance, nous avons commencé avec Bête de Scène par le plus dur : une mini chorale. Par la suite les choses sont plus faciles. Lolo et Catou ont travaillé leurs refrains : ça se met en place relativement aisément sous la houlette de P. qui les coache avant chaque nouveau titre. Ces derniers s’enchaînent de manière plus fluide désormais. Sur Oublie Jako retrouve même la « piste disparue » celle que je traquais depuis plus d’un mois, dans laquelle je ne chantais pas les refrains, ce qui permet aux filles de faire un très beau duo dessus. EcoloSong suscite des débat passionnés : les filles doivent-elle -1- chanter tout le refrain, ou seulement -2- « pas de sauveur pas de héro même pas un Nicolas Hulot » ? ; et aussi -3- doivent elles appuyer sur « de l’action » façon Passionaria comme le suggère P ? Au final, au vu de l’heure déjà tardive, on décide de faire simple et d’opter sur l’unique solution -2-, les filles jugeant en outre que les mecs commencent à devenir lourds avec leurs conseils incessants et versatiles. « Ils n’ont qu’à le chanter, eux « de l’action », conclut Lolo, « après tout l’action c’est un truc de mecs ! »

Ce petit nuage dissipé, on se retrouve sur Spam et ProtestSong, dont les refrains monosyllabiques se prêtent à merveille à l’interprétation chorale. On s’en donne à cœur joie sur des Spam ! explosifs à souhait. Sur Protest, chacun expectore des Rhââââ ! libératoires jaillis du plus profond des entrailles. A cette occasion, je constate que Protest est passé à travers les mailles du filet, et que ce doit être le seul titre dont la voix n’ait pas été réenregistrée. Il se trouve que l’interprétation live envoie de bonnes vibrations, ce qui la rend intéressante, cependant on sent très bien la différence de prise de son, ce qui pourrait nuire à l’homogénéité du CD. En toute logique, il faudrait donc que je réenregistre cette partie, en espérant retrouver les accents convaincants de la version live.

Pour faire un rapide bilan, que reste-t-il pour finaliser ce CD ?
- Refaire la voix de Oublie,
- Refaire quelques parties de guitare que Jako juge un peu floues,
- Refaire un peu de basse,
- Enregistrer les cinq chœurs restants,
- Mixer le tout.

Verrions-nous enfin la lumière au bout de cette longue courbe qui débouche sur la sortie du tunnel ?

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