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dimanche 18 mai 2008

L'oeil de Micromégas, Le Verbe de Phil le K

Soirée difficile pour moi que celle des retrouvailles du mercredi, juste après la folie de la feria. Vous le savez je tente dans ces colonnes d’exprimer l’intime vérité de ce qui peut se passer dans la tête d’un chanteur, fût-il de basse caste, et au-delà de rendre compte de notre progression. Je privilégie l’aspect « sociologique » de notre aventure, et j’aime m’attacher aux relations qui la sous-tendent. J’observe avec le plus grand intérêt le jeu complexe des interactions au sein d’un groupe. Tel Micromégas dans le compte philosophique de Voltaire, premier E.T. qui explorait avant Einstein les mystères de la relativité, je porte parfois (avec la plus grande tendresse) un regard entomologiste sur mes contemporains. Pour cela j’utilise les outils modernes mis à ma disposition par une société de la consommation opiniâtre à produire mille dispositifs d’enregistrements d’évènements sonores et visuels. J’ai employé tous les supports, depuis quarante ans, accumulant une masse d’archives disparates dont certaines d’ailleurs ne me sont plus accessibles, par le fait que l’appareil pour les restituer n’existe plus.

Ce qui en dit long au demeurant sur la pérennité de la mémoire collective. Dans mille ans, On en saura plus sur la civilisation Egyptienne ou les techniques de chasse de l’homme de Cro-Magnon, que sur les modes de vie de l’homme du XXIè siècle. L’encodage de l’information sur la pierre est certes rustique, mais quasiment indestructible, ce qui est loin d’être le cas des signes gravés sur le disque ferromagnétique d’une disquette 3 pouces ¼ d’un pc des années 80.
Ce n’est pas un hasard si je suis passionné de communication et utilise tous les dispositifs possibles pour mettre en boite les évènements que j’ai traversés depuis mon premier instamatic lorsque j’avais sept ans. Par ailleurs j’ai depuis longtemps pris conscience de l’aspect dérisoire de cette quête de la trace, de ce désir vain de marquer les jalons des évènements passés. Car dans cette course folle j’engrange des instants, par le biais de documents de tous types, dont la succession constitue une masse telle d’informations qu’il me faudrait une autre vie pour les passer en revue au risque de ne plus vivre l’instant présent qu’en spectateur.

A titre d’anecdote je me souviens d’un voyage que nous avons fait dans les années 80 avec les Jean en Yougoslavie. J’avais avec moi un équipement de « vidéo légère » un des tout premiers de ce type. Je portais en permanence sur mon dos huit kilos de matériel. J’ai vu mes vacances en noir et blanc durant trois semaines : au travers du viseur de ma volumineuse caméra. Un regard biaisé sur la réalité, dont je n’ai eu la restitution colorée que plus tard au retour, au travers des images imparfaites de l’écran télé. Trente ans après, ces moments que je n’ai vécus que par le biais d’un artifice technologique, se diluent inexorablement dans le bruit de fond électronique d’une bande bientôt illisible. Inanité de l’instant, volatilité de la mémoire, tentative désespérée de fixer le fugace. On ne peut se fier en définitive qu’à ce qui est inscrit au plus profond de soi et tenter comme Proust de sortir les madeleines du four au bon moment. J’ai parfois le fol espoir que peut-être ces instants figés pourront éclairer ma postérité et qu’ainsi d’autres auront une idée de ce que l’ancêtre vivait. Un désir d’éternité en quelque sorte. Une illusion bien sûr. La crainte de plus en plus prégnante de la fin qui se rapproche, et de la futilité du présent sous l’éclairage incertain du futur que je sais voué au néant, mécréant que je suis, hermétique aux mystères de la foi et ses sirènes réconfortantes.

Ce brin d’explication pour souligner un fait important : On ne peut pas toujours être témoin. Même extérieur à l’action, l’observateur interfère avec les évènements. Il en subit le contrecoup émotionnel.

Nous étions donc tous réunis ce mercredi soir afin de reprendre le rythme hebdomadaire des répétitions. Celle-ci était importante puisqu’elle faisait suite à une série de concert dont je vous ai narré le déroulement tantôt. Le bilan était bien sûr mitigé. Il y avait eu du bon et du médiocre. La seconde impression dominant dans le ressenti de certains musiciens. Ainsi Phil, dont la pondération est légendaire, avec le calme qui est le sien, sans laisser transparaitre d’émotions excessives, nous fit-il part de son ressenti. Je n’ai pas les termes exacts en tête, mais grosso modo il stigmatisa notre amateurisme, notre précipitation à faire de la scène dans les conditions que nous connaissons. Il utilisa le mot « ridicule ». Nous avions été mauvais ! Je ne sais pourquoi, mais ses paroles, exprimées sans passion, mais présentées comme une évidence eurent sur moi un effet dévastateur. Je voyais notre orchestre à travers son regard, et il était sans complaisance. Le château de cartes que j’avais édifié au grès de ces chroniques, à jouer au groupe de rock, s’écroulait d’un coup sous le souffle acéré de sa critique. Sous l’aiguillon de son verbe, la baudruche se dégonflait mollement en flatulences pitoyables. J’étais comme un gosse, j’avais joué au rocker comme on s’amuse aux cow-boys et aux indiens. J’avais endossé le déguisement du chanteur, j’en avais copié les attitudes et les mots, et tout d’un coup un adulte venait me dire : fin de la partie, on rentre !

Une douche glacé, qui a inondé mon ego et l’a laissé transi, désemparé. Ma splendide assurance, ma certitude que nous étions dans le vrai, mes postures d’artiste, tout cela était balayé, laminé, par deux phrases sobres de notre batteur impassible. Je pris conscience de ce qu’il avait pu se passer dans la tête de ce dernier pour qu’il en arrive à nous dire ça. « Moi je ne joue plus dans ces conditions », confirma-t-il. Moi qui étais arrivé un peu la fleur au fusil, détendu, et plutôt satisfait finalement de nos concerts, je me retrouvai dans un état de noir abattement, en proie à un cafard insondable. Attention, je n’étais pas satisfait par nos concerts en tant que tels. Moi aussi j’avais vécu beaucoup de déception au cours de ces trois soirées marathon. Mais j’avais apprécié l’expérience que ça nous avait apporté. On dit bien que l’expérience est une lanterne qu’on porte dans le dos, qui n’éclaire hélas que le chemin parcouru, mais tout de même, c’était un apprentissage utile à mon sens, et tout n’avait pas été mauvais. Au travers des paroles de Phil le K, tout m’apparaissait soudain sous un jour nouveau, fait d’approximation, d’hésitations, d’à peu près, d’incompétences. J’eu également l’impression que nous n’étions que des « pretenders » comme disent les anglais. Des gens qui font semblant, qui se la jouent, se la pètent, et j’eus cette certitude qu’au final on nous invitait plus pour rigoler un bon coup qu’en tant que musiciens véritables. S’il y a une chose que je ne supporte pas, c’est bien le sentiment d’avoir été ridicule. Plus que tout autre commentaire que l’on pourrait faire sur moi, le pire serait en effet de susciter la moquerie. L’insulte suprême ! Jouer le Con dans le dîner éponyme.

Je compris que si j’en étais blessé, les autres devaient avoir eu la même crainte, les mêmes doutes. J’en conçus une culpabilité. Les avais-je entraînés dans cette voie trop tôt ? Par goût de l’exhibition les avais-je exposés au sarcasme populaire ? C’était une remise en cause du cadre dans lequel j’avais enfermé les UFR, je m’en sentais responsable. Je lançai, pour plaisanter : cette réunion sera donc celle où nous allons annoncer la dissolution du groupe ? Je me remémorai les paroles de François Lejeune, celles aussi de Jérôme Isenberg, racontant les conditions dans lesquelles leur groupe avait implosé. Conditions similaires, où les membres à l’égo démesuré avaient cherché des responsabilités, sans complaisance, dans le travail de l’autre. J’eu la vision de la fin du groupe, dans des conditions un peu minables. Stoppés par l’obstacle nous rendions les armes, incapable de relever le défi, chacun repartant avec ses rancœurs. La vision de l’échec, du gâchis représenté par ces heures perdues à poursuivre un rêve.

Je descendis à la SJM avec un brouillard dans la tête, et c’est avec des gestes mornes que je pris part à la réinstallation du matos. Tout cela ne m’intéressait plus soudain. A quoi bon ? Puisque de toute façon nous étions mauvais ?

Quelques minutes plus tard nous chantions. Et le plaisir du chant, le plaisir d’écouter mes amis dissipa les denses brumes de mon spleen. J’étais remonté sur le cheval, j’étais de nouveau en selle. Et tant pis pour les cons. Je m’amuse. C’est pour ces répètes que je me traîne de semaines en semaines. Se retrouver ensemble, partager des émotions, interpréter, créer. Jouer Ensemble. Le reste n’a pas beaucoup d’importance. Comme tous les groupes, il y a des moments pour la scène, et des moments pour retourner en studio et avancer. Il est temps d’avancer à nouveau.

Comme s'il m'avait écouté, Jésou entama sur sa guitare la mélodie de "I'll be waiting" c'était doux, à des années lumières du jeu de Kravitz, c'était beau, Odile et moi primes plaisir à chanter dessus. Nous étions bien. Nous étions de nouveau ensemble.

13 commentaires:

Anonyme a dit…

j'apprecie le resume du febriefing de mercredi,mais ce qui me fait plaisir c'est de voir que tu as compris que le "plaisir total" de la musique peut etre aussi(sinon plus) fort en jouant avec ses potes que devant un public.les undertakers sont toujours là!!!!!!!

phil le rectangle

Anonyme a dit…

et même que même Enzo Enzo a connu des galères
c'est pour dire...
kéké

The Undertakers 5 a dit…

Enzo c'est le plongeur en apnée du Grand Bleu, c'est bien ça ?

Anonyme a dit…

non mais, comment tu fais pour être si con, toi ?
c'est une chanteuse ! elle !

kéké ka pa bu donc ké pa sentimental !

Anonyme a dit…

hop,interrnet fonctionne ,je me precipite
une petite pause sur la vie des ufr s'impose car l'actualité de la semaine c'est quand meme l'annif du kéké .Ne l'oublions pas,cela risque d'etre une soirée memorable avec tout le gratin de la cité nimoise qui sera present(on m'a parlé sous le sceau du secret de plus de 200 VIP triés sur le volet)

La famille rollin travaille d'arrache pied a l'organisation de ce grand raout,c'est pour ça que les interventions de pascal se font rares sur le blog ces derniers temps......ça nous fait du repos !
Je tenais a lui dire que s'il a besoin d'aide, surtout qu'il n'hesite pas a demander aux copains!
Pas a nous bien sur,on a autre chose a foutre! mais si des fois il a d'autres copains que nous,il a qu'a leur demander a ces trous du cul !

Bon,comme dirait philou,ça :c'est fait ! ! !
par contre,pour ce qui concerne l'eclairage nocturne des lieux de debauches,je lui rappelle que nous sommes quelques uns a disposer de guirlandes d'exterieur,et que nous sommes bien entendus disposés a les lui louer aux prix fort avec grand plaisir !de plus ,notre bien aimé choriste sponsort,a investi il y a quelques mois dans des effets lumineux exceptionnels ,si kéké le desire ,je suis pret a les negocier, aupres d'alain, a un prix interessants(pour nous)
Voila,un dernier petit conseil,qui m'a été soufflé par philou,
Suite a nos dernieres sorties nocturnes,nous sommes quelques uns a penser qu'il serait plus prudent de reviser a la hausse le nombre de bouteilles de champagne ! !
C'est bien fait ,quand on invite du beau monde,le 51 et le punch,ça suffit pas !
ALLE bon courage quand meme kéké !

poune qui languis samedi et les orages de greles prevus par meteo france

Anonyme a dit…

c'est la panique ...
je trouve plus dans mes musiques le lac du Conemara :
on pourra pas dancer!!!
déjà qu'il n'y aura pas d'alcool...
kéké

Anonyme a dit…

t'as qu'a mettre un bon mike brandt(euphemisme!) et ça ira


poun

The Undertakers 5 a dit…

Mike Brandt (c'est ma prière)c'est bien, Mais Patrick Seb (le petibonomenmouss).. c'est mieux.

Anonyme a dit…

non, Copacabana de Line Renaud...
c'est moderne et ça secoue bien !
kéké

Pascale a dit…

N'oubliez pas la chenille, ça réchauffe.

Pascale qui ne sera pas là, enfin sauf si les vilains agents de la seuneuceufeu font rien qu'à l'empêcher d'atteindre les Voges.

The Undertakers 5 a dit…

j'allume symboliquement un cierge modèle Pascal afin que dans sa grande mansuétude Dieu pose son doigt sur le conflit social des transports feroviaires et leur insuffle la plus grande intransigeance dans la mise en oeuvre de leurs justes revendications : Grêve illimitée jusqu'au 26 mai !

Pascale a dit…

Le dilemne est intense. L'envie d'aller à Epinal, pour une manifestation que j'attends depuis des mois et où je dois retrouver nombre de gens intéressants et sympathiques, et la tristesse de ne pouvoir fêter dignement Monsieur Kéké avec vous, gens non moins intéressants et sympathiques que je n'ai point vu depuis si longtemps.

M'enfin Mitch, si Dieu existe, laisse le tranquille, il a du taff en ce moment.

The Undertakers 5 a dit…

Dieu n'existe pas !
Raison principale qui me conduit à l'invoquer pour un Oui ou un Non, Comme on implorerait le Père-Noël, ou les Principes Démocratiques...