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dimanche 12 octobre 2008

Nuit Orientale

Ce samedi soir j'étais allongé, indolent, devant le plasma familial, découvrant avec stupeur l'étendue de l'offre en matière d'indigence audiovisuelle sur le satellite, quand un appel téléphonique me tira de ma torpeur. Ktoo nous contactait afin de faire le compte des personnes intéressées par une sortie au restau le soir même. Je répondis présent, d'autant qu'Odile, les deux mains dans la farce, occupée à remplir des cannellonis, était un peu embêtée pour tenir le téléphone. Catou ajouta que nous pourrions essayer le restaurant libanais de la rue de la république, à quoi je répondis que c'était une excellente idée, avant de me poser la question, une fois raccroché le combiné (c'est une figure de style, il n'y a plus de combinés et ce qui en tient lieu n'est plus raccroché depuis belle lurettte) : Mais c'est quoi déjà la spécialité libanaise ? (J'appris plus tard que son nom est d'origine tchèque mais je ne veux pas déflorer trop tôt le sujet).

Sur le chemin pour rejoindre les 2Zi chez eux, Odile me confirma qu'elle n'avait aucune idée de ce que nous allions manger, mais nous nous accordâmes sur un modèle marocain à base de tajine sans doute, mâtiné de pakistanais, pour la partie épice. En quoi nous nous trompions, pas tellement sur la cuisine elle même qui tint à peu près ses promesses levantines, mais plutôt sur un élément dont nous avions ignoré la présence non négligeable : la partie cul. Mais je laisse au déroulement de ces lignes le soin de ménager un léger suspense avant de vous en dire plus.

Nous ralliâmes les arènes à pied, afin d'y rejoindre les Ritchwood et les Charras. Nous ne manquâmes pas de saluer Christian, qui étale sa cape pour l'éternité sur le parvis des arènes, en bute aux pires exactions des pigeons et des touristes. Les premiers étant surnommée les rats volants, et les seconds les rats des goûts, étaient absents en ce début octobre, à cette heure tardive. Sans doute les uns et les autres préféraient-ils désormais des destinations plus exotiques, avec d'autres statues à conchier, ou à caresser, ou bien épuisés par les trajets, les visites et les déambulations, goûtaient ils un repos réparateur dans quelque lieu standardisé avec d'autres congénères de leurs espèces respectives.

Nous attendîmes un peu nos amis ouest-nîmois dans le cadre agréable de Libanim (jeu de mot !) qui ouvre ses vastes baies à l'angle de la rue Cité Foulc et de la rue de la République. Nous apprîmes dans la conversation que le propriétaire était médecin, entrepreneur de maçonnerie, et restaurateur. Joli parcours me dis-je en détaillant distraitement la carte glissée par une jeune personne dont les formes généreuses animaient avec sensualité une robe à mi-cuisses en tissus moulant noir. Un accorte personne comme on l'aurait nommée au siècle dernier, potelée, vive et gracieuse, avec un sourire lumineux et un humour communicatif, en un visage enfantin encadré par une chevelure de geai, longue et laissée en liberté.

Ces observations, ainsi que la conversation, la consommation d'un apéritif et l'étude approfondie de la carte nous permirent d'attendre nos amis une petite heure, le temps qu'ils finissent leur apéritif sans doute. Mais cela coïncida avec « l'instant Marlboro » qui réunit les fumeurs devant le restaurant, et les gens normaux à l'intérieur. Dans le groupe de ce samedi, il y avait deux gens normaux. 25%, somme toute ce n'est pas si mal.

Nous avions commandé le menu à 18 euros. En entrée il y avait un assortiment de mezzés sortes de zakouskis à mi-chemin entre les tapas et la kémia, et en plat principal des kafka, ainsi nommés en hommage à Frantz , né à Prague tant ce qui rentre dans la composition de la farce est Ubuesque.
La jeune serveuse en prenant la commande nous régala de son humour libanais, nous demandant avec sérieux si le repas s'était bien passé, ce qui nous fit bien rire. Elle nous raconta qu'elle avait posé la même question, mais sans malice, à un couple quelques jours auparavant. Un malentendu avec l'autre serveuse était à l'origine de ce cocasse qui pro quo. Nous rimes de bon coeur à nouveau, partageant l'hilarité de notre hôtesse a l'évocation des visages aux abois des clients affamés. Elle nous quitta d'un lascif déhanchement pour rejoindre l'office tandis-que de notre coté nous rejoignîmes le cow boy afin de partager avec lui la pureté d'un air limpide. Dans le silence de la place des arènes, nous voyions Nimeno éclairé au sodium par les spots alentours, les chaussées étaient calmes, la température agréable.

C'est au travers de la devanture que je vis arriver de grandes assiettes et donnai le signal de la retraite à mes compagnons. L'entrée était vraiment appétissante : les assiettes larges comme des enjoliveurs de Hummer, offraient une variété de petites choses aux saveurs délicieuses. Nous nous regardâmes : On n'arriverait jamais à manger tout ça ; d'autant que pour suivre il y avait encore Le Plat : Les kafka (sortes de steacks de boeuf hachés accommodés avec des oignons et du persil) .

Je pris mon temps, veillant à ne pas avaler trop rapidement des bouchées que je coupai avec modestie. Je regardai autour de moi les autres convives, dont chacun développait sa stratégie pour venir à bout de ce plat ET se ménager de la place pour la suite. Vers la fin, certaines assiettes étaient vides, mais je laissai quant à moi un reste de taboulé, alors que d'autres proposaient tel ou tel mezzé à leurs voisins. Tant bien que mal toutefois, vint le moment où chacun positionna ses couverts dans l'assiette pour signifier que c'était ok pour la suite.

La jeune serveuse en prit conscience, et se présenta à nous, avec son merveilleux sourire, son corps souple toujours parfaitement moulé dans cette robe noire de cocktail.
« Vous avez terminé messieurs-dames ? Ca vous a plu ? Est-ce que vous voulez du dessert ?
Jusque là nous avions répondu par des vivats à chacune de ces questions. Comme dans une scène où chacun connaît son texte, et répond sans y réfléchir à des propos convenus. Mais sur sa dernière question, alors que nous répondions machinalement, ouiiiiiii ! Il nous sembla que nous avions raté un épisode. Nous réalisâmes qu'en fait cette assiette d'entrée dont chacun avait fait l'apologie pour sa variété et son abondance, était Le Plat aussi. Pourtant un doute subsistait encore, car nous avions toujours en mémoire la bonne blague du début, où la demoiselle nous avait demandé, avant de prendre la commande, si nous avions apprécié le repas. Il y eu une minute d'échange de regards, d'hésitations, de sourires gênés, de chuchotements pour savoir si c'était du lard ou du cochon.
En fait ce n'était ni l'un ni l'autre : Nous primes du dessert !

Comme quoi il faut se méfier avec l'humour.

Sur le dessert la serveuse nous fit une démonstration de danse à l'orientale, ses mouvements de hanches étaient stupéfiants et me rappelèrent, en beaucoup plus sensuels, ceux des Tahitiennes. Liz ou Catou me fit remarquer à quel point il était paradoxal qu'une culture orientale basée sur la dissimulation des formes de la femme permette une telle liberté de mouvements, une telle expression quasi animale de la féminité dans les danses. Nous sommes comme ça dans le groupe, un rien nous est prétexte à philosopher et progresser sur le chemin de la compréhension du Grand Tout. Je pus approfondir d'autant mieux que la fille m'invita. je dus agiter mon corps en face, tout en face de cette gazelle dodue qui s'abandonna, jouant de son corps comme d'un instrument, habitant la mélodie et ses rythmes langoureux. Voilà pour la partie cul évoquée en début de ce propos.

J'allai m'asseoir dans un état proche de la Jordanie (c'est plus proche géographiquement et culturellement du Liban que l'Ohio).

Avant de partir je remplis au nom du groupe le livre d'or. Auparavant j'avais appris à notre gracieuse hôtesse que j'étais chanteur et que d'autres musiciens se trouvaient à table. Je pense que c'est pour cette raison, et l'admiration que suscite toujours cette information donnée en général un peu par hasard qu'elle nous gratifia de cet honneur réservé aux VIP. Je laissai donc en guise de compliment notre nom et mon numéro de téléphone, précisant que nous jouions à l'occasion des bar mitzva, circoncisions et autres baptêmes.

Nous terminâmes la soirée chez les Desimeur. Nous pûmes admirer le superbe tableau peint par une artiste astigmate et bourrée, ainsi que la tête de cheval en fer forgé récupéré sur des rampes d'escaliers offert par Philou à l'occasion du 27ème anniversaire de leur mariage. L'ambiance était très agréable (malgré le sentiment de malaise suscité par les angles improbables du tableau). Les uns assis dans les profonds fauteuils clubs, d'autre dehors, fumant ou buvant un digestif, tandis que je me tenais moi même près de Laurence, qui nous joua avec beaucoup de sensualité (comme quoi il n'y a pas besoin de petite robe noire moulante) un extrait d'une composition de Philip Glass.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Je ne voudrais pas vous vexer mais en ce moment vous parlez plus de boissons, de bouffe que de musique


au fait, je n'ai pas aimé le commentaire sur la sortie foot,
j'ai ressenti que c'était plus pour montrer que vous aviez un statut priviligié que pour soutenir les joueurs et pour l'amour du foot

a quand votre prochaine prestation en public ?

navrée si je vous ai froissé, vous allez dire que je ferai mieux de rester dans mon terrier , chose que je vais faire, mais je continuerai à lire votre blog si vous revevez un peu plus sur la musique,

bon courage à tous

Anonyme a dit…

si vous revevez : à force de parler boisson et bouffe, j'ai l'impression que cela affecte mon mental. je voulais dire si vous revenez sur le sujet qui est la musique. j'ai un peu déraillé. allez je retourne dans mon terrier pour bosser,

The Undertakers 5 a dit…

Bonsoir chère anonyme.

Sur les deux points vous avez raison.

Pour le second, qui a trait au football, en effet, je me soucie comme d'une guigne du championnat de France et des péripéties de tels ou tels joueurs. Pour tout dire, cela me donne même à la réflexion, une certaine idée de l'infini.

En revanche, mon indifférence vis à vis du foot en tant que sport cède le pas à mon intérêt pour son coté spectacle.

J'aime bien l'ambiance, et porte énormément d'attention à ce qui se passe autour. C'est ma nature, j'aime observer. Je fais de même quand j'assiste à un opéra, une corrida, une soirée.

J'ai voulu restituer cela dans un texte que j'espère gentiment ironique, où en effet je tente de rendre le coté mondain de ce genre de manifestation.

je me pose en spectateur, mais je ne m'exonère pas des petits travers que j'ai pu observer.

Je fais partie de ce milieu, et je l'aime bien au fond même si je suis lucide par rapport à son coté un peu artificiel et vain parfois.

d'une certaine manière, au bout de l'analyse, à quoi bon manger et boire, ou fumer, à quoi bon rencontrer des gens, à quoi bon faire de la musique, à quoi bon vivre, puisque pour autant, à la fin, tout cela finira dans le meilleur des cas en souvenirs de plus en plus vagues dans la tête des contemporains survivants.

Pour la deuxième critique, sous-jacente, qui pointe sur l'éloignement de mon propos du sujet principal que serait la musique :

Tout d'abord ce blog est consacré aux fossoyeurs (nous) plus qu'à la musique.

C'est une sorte de chronique people interne. J'essaie de parler musique, mais en définitive ma culture musicale n'est pas très étendue, et couvre à peine le champ convenu de ce qu'un cinquantenaire lambda ne peut pas ignorer des groupes de rock de sa jeunesse.

je suis incapable de faire une critique pertinente du jeu de tel outel guitariste, ou encore des audaces harmoniques de tel arrangement.

Pour faire une comparaison alcoolique, loin d'être un de ces oenologues de concours qui vous situe un vin sur un coteau ou un cépage les yeux bandés au simple contact du nez avec le bouchon, je ne suis qu'un de ces beotiens tout juste capable de se déterminer selon deux critères : j'aime, et j'aime pas !

Par ailleurs, je fais tout de même la part belle à notre expérience musicale, puisque je tiens hebdomadairement la chronique de nos répétitions, dont le caractère répétitif ne vous a pas échappé, mais aussi de nos concerts, de nos progrès, nos doutes, nos compositions personnelles, nos textes, nos séances de studio, ou des spectacles que nous voyons.

Egalement j'aime les travaux graphiques, les pochettes, les photomontages, les affiches, tout ce qui concourt à une mise en scène de notre groupe dans le but de "faire comme les grands" et de toucher à l'éventail des métiers de la production musicale.

Et puis j'adore écrire. je réponds ici un peu au souhait d'un proche, de tenir une chronique des activités d'un groupe d'amis de trente ans (je précise : "qui se connaissent depuis trente ans").

J'ai bien demandé à certains contributeurs d'écrire eux aussi des articles, mais ils ne le souhaitent pas ou n'en ont pas le temps (ils ne sont pas fonctionnaires, eux).

Par conséquent ce blog est nombriliste, partial, il y a des contradictions, des ambiguités, sa ligne éditoriale est floue, et sujette à mes influences de l'instant.

En bref, ma motivation principale est, en me faisant plaisir, de tenter de découper une tranche de ma vie et de ses interactions avec mes amis.

J'ai l'espoir, par la suite, de compiler et trier ces notes afin d'en faire quelque chose de cohérent.

mais je suis paresseux.
Je m'en excuse.

Je vais essayer de me recentrer sur le sujet principal.

Et j'espère continuer à lire vos interventions (n'hésitez pas à écrire du fond de votre terrier aimable animal à longues oreilles).

Mitch, le Sage. Sage entre tous les Sages, d'ici, d'ailleurs, et au delà.
Par ailleurs (quasiment) infroissable.


Ah oui, pour l'instant nous sommes plutôt dans une démarche de création et de mise en conserve des acquis (on veut enregistrer un album de compos persos.). Mais viendra bien le moment où nous voudrons sortir de notre tannière pour nous produire à nouveau en public. Nous ne manquerons pas d'en parler ici.

Stay tuned, comme disent nos amis anglais.

Anonyme a dit…

Sa vien se comantair sur merc redi