Website Ribbon

samedi 5 mai 2007

Le Diable se niche dans les détails

On sent bien que ce qui avait commencé comme une partie de rigolade dont nous ne savions pas bien si elle aurait des lendemains, commence à peser sur nos vies d’une empreinte certaine. Nous allons boucler notre quatrième mois de répétitions. Ce qui représente à la louche 35 rencontres. Soit grosso modo 70 heures de pratique. Je nous regardais jouer ce jeudi soir, interprétant l’écolosong du Pascou. Mine de rien il y avait de la concentration, du sérieux. On ne rigole plus ! à la place il y a le réel désir de jouer « propre », carré. Il n’y a peut être pas autant de déconne mais il y a du pur plaisir. Pour preuve le fait que les pauses sont moins fréquentes, la boisson ambrée et le limoncello moins centraux. Lors d’une des deux pauses de la soirée, nous avons évoqué l’échéance des 50 ans.
J’ai posé la question : Cette date butoir est-elle le vrai but de notre association ? ou bien d’ores et déjà pouvons nous nous projeter au delà, et nous fixer d’autres objectifs, plus ambitieux ? A tout le moins celui de ne pas dissoudre le groupe à l'issu de cet anniversaire. Nous sommes des amateurs, comme des milliers de groupes, jeunes ou vieux dans notre cas. Mais cela ne nous empêche pas de vouloir nous produire sur une scène, quelle qu’elle soit. Les 70 heures d’entraînement portent leurs fruits, car nous avons appris à connaître nos réactions. Le déchiffrage des partoches est plus rapide, les accords mieux maîtrisés. Le simple désir de déchiffrer et de jouer ensemble est dépassé. Nous voulons en plus que ce soit parfait. Le Diable se niche dans les détails dit-on. Le Démon en effet , celui de la musique, nous pousse à régler toujours plus finement les interventions de chacun. L'inventivité de Pierrot est prodigieuse, 5 versions successives de ProtestSong, toutes interessantes. Hier il nous a trouvé un arrangement très swing, plus mélodique, on abandonne cette ligne lourde et hypnotique qui faisait la spécificité de Protest au profit d'une interprétation plus légère. Ça métamorphose complètement la chanson. En plus le nouveau refrain colle bien à cette mouture :
je me tourne vers l'est
je me tourne vers l'ouest
je ne vois rien que je ne déteste
cours, Forest !
Très amusant à chanter, surtout avec le petit jeu scénique imaginé par Pierrot.
Le soucis c'est qu un cercle vicieux s'installe, comme nous sommes indécis sur cette chanson, les versions se multiplient, ce qui nous oblige à la redécouvrir à chaque fois et ne nous permet pas d'entamer sérieusement son apprentissage.
Il va vraiment être nécessaire d'arrêter un choix définitif à son sujet.
Cette dernière version, que nous appellerons V5.0, nous ne l'avons pas approfondie et sommes revenus à la 4b qui reprend l'arrangement « lourd », amendé toutefois d'un fond mélodique qui en adoucit le tranchant. Reste à travailler le solo afin de l'aérer, et aussi à placer les choeurs.
Ecolosong se porte bien. Nous ne l'avons joué qu'une fois, mais quasiment à la perfection. C'est la plus aboutie, pour l'instant, de nos compositions personnelles. Tout est en place ou presque, le pont marche bien, l'association guitare flûte sera intéressante dès que j'aurai réglé mon jeu, les choeurs se dessinent. Là nous sommes au pied d'un pallier. Il nous faut caler les voix, Pierrot peut chanter plus haut que moi, mais Pascou et Jésou chantent à peu près dans la même tonalité et ont du mal à se décaler l'un par rapport à l'autre et à se situer vis à vis de nous. Les voix pour l'instant ne sont pas bien différenciées. Mais tout de même ça sonne pas mal.
Il faut se méfier aussi de ce que l'on croit acquis. En effet depuis deux ou trois séances, nous ne touchons pratiquement pas à Whatever. Lors de la reprise de la semaine dernière, nous avions noté une dégradation de notre jeu sur ce titre. Donc l'enseignement est que même si on doit travailler un titre particulier, il faut entretenir le reste,bien qu'il fasse partie intégrante désormais de notre mémoire procédurale.
Ah, la mémoire procédurale. Intéressant ça aussi. Il y a schématiquement deux sortes de mémoires. La mémoire de travail est cette partie de la mémoire qui nous permet de nous souvenir de ce que nous avons fait quelques secondes auparavant. Sa rémanence est courte, elle stocke un numéro de téléphone en gros, puis se vide au bout de quelques secondes. C'est celle qui nous sert pour déchiffrer un nouveau titre. C'est celle que j'utilise quand je chante en lisant un texte. Je dois me concentrer constamment dessus, et par conséquent toute mon attention est tournée vers une bonne lecture au détriment de l'émotion que je pourrais y insuffler. A l'inverse la mémoire procédurale est une mémoire long terme. Elle stocke des évènements qui se sont littéralement imprimés dans des réseaux neuronaux. Transformant ces informations en « engrammes » des éléments qui resteront disponibles quasiment instantanément sur une période de plusieurs années, surtout si une forte émotion lui est associée. Ainsi quasiment tout le monde se souvient-il parfaitement de ce qu'il faisait le 11 septembre 2001. Il n'est plus besoin de réfléchir, cette mémoire se déroule automatiquement, presque inconsciemment. Cette mémoire me permet de chanter whatever sans penser aux mots ni à leur signification, ni à l'inflection de la voix où à sa synchronisation avec les musiciens. Tout cela est inconscient,comme le conducteur qui emprunte chaque jour le trajet de son travail et qui arrivé, est incapable de se rappeler ce qui s'est passé durant sa conduite. Ce processus mémoriel me permet de me décharger de toute la partie lecture, et de me concentrer au niveau conscient, sur l'interprétation..
Comment, la dame au grand chapeau à droite ?
Je ferais mieux de ne pas faire appel à ma mémoire procédurale ?
J'ai autant d'émotion dans la voix, qu'un plat de spaghetti sauce carbonara ?
Merci pour vos encouragements madame !
Ça réchauffe le coeur et conforte ma sensibilité d'artiste !
Sécurité, pouvez-vous faire évacuer cette dame s'il-vous-plait ?
Hum, bon, ou en étais-je ?
Notre sujet d'inquiétude, pardonne-nous Alain, c'est le batteur. Notre ami s'est isolé depuis trois mois. Il est entièrement pris par son travail, et la musique n'est pas l'élément vers lequel il va naturellement se tourner pour amoindrir son stress. Le reste du groupe a beaucoup progressé durant cette période. Nous nous aidons beaucoup de Alain V2.0 dont l'interprétation froide et métronomique a au moins le mérite de nous donner une base rythmique. Mais en concert cet appareil ne remplacera jamais le batteur. Alain il y a quelques jours m'a affirmé que nous allions être surpris. Il est vrai qu'une grande responsabilité va peser sur ses épaules, tant, de fait, l'efficacité du batteur est une condition sine qua non pour un groupe de rock. C'est même la raison d'être de ce genre musical !
Enfin, tout ça n'est qu'un détail, et c'est bien le Diable si nous ne trouvons pas une solution.

Nouvelles brèves : anniversaire du Philou ce 5 mai. Nous pensons à lui, perdu sur les flots, prisonnier avec Hubert Eric Pascou et leurs épouses, d'un paquebot de luxe voguant entre Savone et Barcelone. Pascou sera donc absent jusqu'à la répétition de mercredi prochain. Mais il ne désespère pas de s'exercer sur la basse d'un musicien de l'orchestre du bord !
Un vrai professionnel notre ultrabassiste du XXIème siècle....

Aucun commentaire: