Pour reprendre Brown Sugar, j'ai eu une surprise à la dernière répète du mercredi : P. a sorti de son sac à malice une sorte de tire-bouchon pour jéroboam et une chuppa chupps vanille-crème fraîche à moitié croquée : "Tiens, c'est pour toi m'a-t-il précisé. Puis il a percuté le tire-bouchon avec la demi chuppa chups et ça a fait un bruit rythmique. "Tu joues ça pendant le refrain et tu vois (sa voix se fit emphatique et mystérieuse) : si tu tapes de l'autre coté, tu as une deuxième note ! Mes yeux s'arrondirent, et ma bouche béa en un "ouahhhhh" silencieux.
Solennellement il me tendit les objets, attentif à ma façon d'en prendre possession et presque un peu réticent à l'idée de s'en séparer. Surprenant son regard je les pris précautionneusement, et avec respect. Devant lui, avec déférence, je fis la démonstration que j'en avais compris le fonctionnement, vérifiant tout de même à tout hasard qu'il n'y avait pas une clé pour en parfaire l'accord ou un quelconque bouton pour faire varier le volume. En tous cas je constatai qu'il n'y avait pas de logement à pile ni de jack à brancher, ce qui est exceptionnel de nos jours en matière d'instrumentation musicale.
On répéta Brown Sugar ; je m'acquittai de ma tache en synchro avec le regard du Carré, accompagnant le Leader dans son riff de saxo. Je fus envahi de fierté : j'étais enfin des leurs.
J'étais musicien !
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