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mardi 24 mai 2011

Les Guitares Improbables de P.

Pierrot, ça a l'air d'un calme comme ça, avec son allure d'adolescent nonchalant, mais faut pas trop le chauffer. Chacun des musiciens a un souvenir glaçant de son regard ténébreux et lourd d'invective muette lorsqu'un tempo n'est pas respecté, un enchaînement négligé ou un guitare incorrectement désaccordée. Et je ne parle pas de ceux qui baguenaudent ou folâtrent pendant ses solos, ou carrément abandonnent le titre et se mettent en roue libre en feignant de régler des volumes, ni de celles qui essayent de nouvelles sonorités sur leur clavier neuf, inattentives à ses admonestations silencieuses.
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Je me suis souvent demandé ce que voulait dire "l'oeil du tigre" et ce n'est pas cette tarlouze de Rambo et son avatar de boxeur improbable Balboa qui me convaincront de sa réalité. La seule manifestation patente de l'existence d'un tel regard de serial player m'est apparue lors des répétitions du mercredi soir.
Parfois la nuit je me réveille d'un bond, fiévreux et en proie à une angoisse incoercible ; je ne me souviens pas de la nature de mon cauchemar, mais je sais avec l'acuité de celui qui a vu la face d'un démon, que cela a un rapport avec cette vrille oculaire a l'insoutenable fixité pointée sur tel ou tel de mes malheureux compagnons.

En concert, une fois, j'ai même assisté en personne à un évènement encore plus incroyable : Tétanisé par une rage froide après que le bassiste ait une fois de plus décidé d'arranger à sa sa sauce une partition pourtant cent fois rabâchée, notre Leader s'est soudain figé. Il a bandé ses muscles d'acier, et il a littéralement déchiré sa guitare en deux. Dans le sens de la longueur ! dans un vacarme effroyable de sons saturés sous les hurlements de douleur de l'instrument martyrisé qui m'ont rappelé ceux de la guitare de Hendrix interprétant le Star Sprangled Banner devant un auditoire sous le choc lors du concert de Woodstock.

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