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mardi 12 octobre 2010

Où L'On Se Souvient de Lennon et Se Méfie de Mozart et du Bavardage

Exceptionnellement nous répétions un mardi pour cause d’anniversaire d’Odile le lendemain. J’écoutais une interview de Higelin ce soir-là, en rentrant du boulot à l’occasion de la sortie de son dernier album. Comme John Lennon, il est né en octobre 1940. L’un et l’autre sont donc septuagénaires. Bien que Lennon le soit par contumace, si l’on peut dire. Higelin admire Lennon, et cite volontiers le leitmotiv de ce dernier lors de répétitions : « trop de notes, trop de notes !» encore que Wikipédia nous apprenne que c’est Joseph II qui le premier employa la formule pour fustiger la complexité musicale de « L’Enlèvement Au Sérail » l’opéra de Mozart. « Lennon passait son temps à encourager ses musiciens à épurer le message, explique Higelin, « moi-même je reconnais que dans certaines chansons je parle trop : Il faut sans cesse lutter contre le bavardage qui brouille la communication avec les gens». « Une bonne chanson doit pouvoir être chantée avec juste un instrument, avec un minimum d’arrangements. D’ailleurs, poursuit Higelin, je n’aime pas ce terme « arrangement », je ne sais pas ce que ça veut dire. On s’arrange avec quoi, avec qui ? « Je préfère parler de communication parfaite entre musiciens. Si les musiciens s’entendent bien, ils savent jouer ensemble et l’arrangement se fait tout seul ».

Pourquoi je vous parle de ça au fait ? Peut être parce que cette réflexion d’Higelin m’a fait sourire tant elle me rappelle des conversations que nous avons eues à plusieurs reprises déjà à propos de notre musique et de celle de certains groupes que nous avons vus .. Peut-être parce que tandis que je chantais « Mad World » de Gary Jules, un titre minimaliste –piano/voix- suggéré et accompagné par Lolo, j’entendais nos musiciens rentrer les uns après les autres dans le jeu et ne pouvais m’empêcher de penser à cette histoire de « bavardage ».

Auparavant nous nous lamentions encore sur notre prochain arrêt de la cigarette chacun y allant de sa recette pour sortir de l’addiction. Un consensus se dégagea je m’en souviens sur l’absolue nécessité de compenser par le sport. L’un vanta les vertus du golf, l’autre celles du vélo, un troisième prôna les joies de la course à pieds tandis qu’un dernier ne tarissait pas d’éloges sur le yoga. Il me semble d’ailleurs que c’était le même. Je les écoutais, atterré. L’épuisement salvateur, la maîtrise de soi, le défoulement, autant de raisons invoquées, supposées combler le vide spirituel engendré par l’arrêt du tabac. Je n’ai jamais trouvé AUCUNE sorte de réconfort dans la pratique d’un quelconque sport, cette notion m’est étrangère, et aucune connotation de plaisir n’y est attachée dans mon esprit. C’est une espèce de handicap dont je ne suis pas fier, qui accompagne d’ailleurs mon total manque d’intérêt pour le jeu sous toutes ses formes, et son corolaire : la compétition qui suppose le désir d’être plus fort que son voisin, de se mesurer à lui et d’après ce que je comprends, d’en tirer une satisfaction.

D’ailleurs cette notion de compétition me renvoie immanquablement sur le double concept déjà évoqué me semble-t-il ici dans un article sur Chomsky : La compétence versus la performance. Je conçois la compétence, qui me semble être plutôt légitime, dans la mesure où tu espères que le dentiste, au hasard, qui va s’occuper de tes dents soit dépositaire d’un savoir minimum pour ne pas te niquer totalement la mâchoire, la performance cependant suppose une « compétence compétitive » en quelque sorte, dans le but d’être plus efficace. Et le culte actuel et ambiant de l’efficacité, pire : de l’efficience m’agace au plus haut point. Vous me direz que le type qui a eu l’idée d’être plus performant en faisant cuire la viande pour la manger, dans le double but de la conserver et de la mâcher plus facilement infirme ma théorie fumeuse, en même temps a-t-il du être meilleur que les autres pour cuire son premier steack, ou bien le rôti primordial fut-il le résultat d’une coopération, ou mieux, comme le plus souvent dans les découvertes fondamentales le fruit d’un heureux hasard ? Quand à moi j’aime bien l’idée du hasard se parant des atours de la nécessité pour mieux tromper l’humain et le conforter dans l’illusion de sa supériorité dans la compétition des espèces.

Allez ça y est ! Il est reparti dans ses délires : Tu as raison, lecteur excédé et avide de nouvelles musicales : Concentrons nous sur les vraie choses de la vie, focalisons nous sur l’actu des UFR.
Donc ce dernier mardi, après une arrivée tardive du Leader qui avait zappé l’info sur le déplacement de la répète (même s’il s’emploie à vous convaincre du contraire), les Fossoyeurs ont continué à travailler leur vaste répertoire.
Ils entamèrent les hostilités par une reprise (Mad World) dont je vous ai dit quelques mots plus haut dans le style du regretté « I’ll Be Waiting » de Lenny Kravitz, en plus dépouillé. Ils poursuivirent par « Alabama », dont ils se souvinrent qu’en son temps, lors d’une fête de la musique sans doute un peu trop arrosée ils tentèrent de l’hybrider avec le « We Will Rock You » des Queen sous prétexte que les rythmes étaient similaires, Puis ils mirent un point d’honneur à consciencieusement mépriser le Tush des ZZtop pour la troisième fois consécutive arguant qu’ils ne s’en rappelaient plus les accords (soyons sérieux, QUAND cela a-t-il jamais gêné les Fossoyeurs de massacrer tel ou tel titre au motif de n’en pas connaitre la moindre mesure ?). Après la dernière pause tabagique de l’histoire des UFR, ces derniers conclurent la séance par Le Train de la Vie qu’ils interprétèrent sobrement et plutôt bien.
La soirée s’étira encore autour d’une bouteille de champagne et de cannelés (délicieuses pâtisseries atlantiques) en raison de l’anniversaire du chanteur.

Deux jours plus tard, le trente septembre, pour enterrer leur vie de fumeur la plupart des musiciens moins le batteur et le chanteur se retrouvèrent au Fox Taverne le bar de Jean-Christophe Fossard ci-devant associé de l’Oxbridge où l’on se rappelle que les UFR se sont produits à quelques reprises. Au milieu d’une clientèle très jeune abreuvée aux shooters de vodka (16 euros les 9), la joyeuse compagnie immola ses dernières cigarettes sur l’autel de la Santé Publique.
Le groupe euphorique se rappela au bon souvenir du patron venu se mêler aux conversations, qui proposa une date : le 10 décembre, afin que les Undertakers honorent de leur présence cette nouvelle scène et impriment leur marque de ce coté-ci de la Maison Carrée. Nouveau contrat, nouveau challenge, flatteur bien sûr mais qui suscite une inquiétude : Aurons-nous le courage de jouer devant des inconnus, très jeunes de surcroît ?

Le mercredi suivant ce fut à nouveau sans le chanteur, cloué par un lumbago paralysant, que le Groupe se retrouva en répète à la SJM. Selon la pianiste la séance fut rondement menée, à peine entrecoupée d’un semblant de pause réduite en peau de chagrin, minée par une anorexie alcoolo-tabagique désormais de rigueur à la satisfaction générale des observateurs soucieux de notre bien être.

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