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dimanche 7 décembre 2008

Bleu

Inexplicablement, ce mercredi soir, je me sentais un peu dolent. Peut-être était-ce le froid extérieur qui n’incitait pas à l’expédition nocturne. Je parcouru dans ma tête les raisons plus ou moins fumeuses que j’aurais pu invoquer pour décliner l’invitation hebdomadaire au chant. L’enfant malade, la gastro fulgurante, la fuite d’eau massive, quelque intempérie soudain et local…

Hélas j’avais épuisé mon stock. Il est des moments où il faut se rendre à l’évidence : Quand faut y aller, faut y aller ! Un motif beaucoup plus impérieux me dictait de surcroît cette sage décision : notre chatte, Coca. Une chatte pas banale, ceci dit. D’ailleurs nous avons pris l’habitude de parler d’elle en son absence en disant « coca pas banale ». Coca pas banale, Copacabana, la baie de Rio… La simple évocation de ma chatte m’entraîne à des rêveries exotiques et érotiques peuplées de créatures de rêves sur des plages paradisiaques. Mais le fil de mes pensés, déjà, m’écarte de l’objectif du présent rapport.

Notre chatte bien que très fine, ce félin gracile et désinvolte au comportement délicat, se double d’un carnivore au solide appétit. Ca mange ces petites bêtes, c’en est incroyable. Comment peu-on on ingurgiter une fois et demi son poids dans un journée et garder cette ligne de top modèle ? Ca se chiffre en dizaines de kilos par an. C’est un budget. Le moindre sachet de 500 grammes coûte une fortune : nous avons payé le dernier, dans une jardinerie, 5€80. Les croquettes de notre chatte chérie coûtent plus cher que les crackers de l’apéritif ! Et elles ont meilleur goût. D’ailleurs certains d’entre mes lecteurs, invités à la maison récemment n’ont pas dit le contraire, qui ne se sont aperçus de rien lorsqu’ils ont mangé ces délicieux toasts « au saumon » ainsi que ces très colorées verrines « à la betterave » que nous leur avons proposés en amuse-bouche. Forte de cette constatation, et désireuse d’équilibrer les dépenses du ménage, ce qui est un soucis constant chez les Mazet, Odile s’est rappelée que nous connaissions une éleveuse parmi nos proches.

Elodie remporte régulièrement des compétitions internationales canines avec ses deux chiens : le Corso fleuri, et l’Espincher nain. Le dessus du frigo, dans la cuisine, est le témoin éclatant de cette réussite, il en constitue le réceptacle et la vitrine. Comme autant de Grool, (un graal : des grool), les coupes finement ouvragées dans les métaux les plus précieux, arborent sur des plaques d'or scellées dans des socles en marbre, les élogieux palmarès glanés aux quatre coins de l'hexagone, et même au delà. Quand on manoeuvre la porte du conservateur, ou bien quand le thermostat intime au compresseur l'ordre de se mettre en branle, c'est un joyeux tintinnabuli de ciboires s'entrechoquant qui accueille le consommateur occasionnel ou régulier.

Ces succès sont dus à une sélection génétique rigoureuse, un entraînement intensif, un dressage constant, mais surtout à des repas diététiques amoureusement préparés. La fringale de ces bestioles, soumises à des cadences soutenues nécessite une alimentation équilibrée et quantitativement importante. En tant qu’éleveur, Elo bénéficie d’importantes ristournes pour l’achat en gros de nourriture. Ainsi se fait-elle livrer une palette de graines pour chien tous les trois jours. Elle a accepté de nous faire profiter des prix de gros qu’elle a négocié avec les fournisseurs. C’est donc pour cette raison surtout que nous ne pouvions manquer la répétition du mercredi, notre chatte criant famine devant sa gamelle vide depuis quelques jours, et recevant quant à nous d’autres amis prochainement.

Je plaisante, bien sûr. C’est l’enthousiasme sans cesse renouvelé, et l’attrait de la Salle des Possibles Musicaux, la « rythmythique » SJM, qui nous pousse chaque semaine à nous rendre chez les Fabre, comme les pèlerins font le voyage de Compostelle afin d’y rencontrer l’Indicible.

Nous arrivâmes vers 21 heures, le temps d’attendre Pierrot, d’admirer la coupe gagnée par Kayak la chienne, en championnat, et de caresser sa fille* (Canoë) qui arbore un très joli pelage gris. Dans le milieu canin, il faut le savoir, « gris » se prononce « bleu ». C’est en tout cas ainsi qu’Elodie, de passage avec le chiot nous l’a présentée : « Un cane corso bleu ». A ce compte-là me dis-je sur l’instant, comment qualifier la couleur des Schtroumpfs ?! Sans doute une teinte au-delà de l’indigo, non encore répertoriée dans le nuancier Pantone. Il est vrai que sous un certain éclairage, riche en ultraviolets, et en plissant fortement les yeux, à la lumière rasante, on distingue assez nettement des reflets tirant plutôt sur le bleu en mobilisant cette partie du cerveau qui, très sensible aux agents psychotropes, libère l'imagination et encourage à la rêverie hallucinatoire colorée. En la circonstance, un soupçon de daltonisme peut aider. Et pourquoi pas un doigt de cette boisson au tartan écossais dont on sait qu’elle a contribuée à asseoir la légende du Loch Ness en son temps, et donc tout à fait capable d’habiller en bleu n’importe quel animal.

Quand je parle plus haut de « caresser sa fille » bien sûr il fallait comprendre « la fille de kayak » pas celles de Pierrot. Comme je citai l’un et l’autre dans la même phrase et que j’ai une fâcheuse propension à multiplier les digressions, je voulais m’assurer qu’aucun amalgame, aucune confusion, et partant, nulle controverse ne puisse prendre corps à la lecture de mes propos. Plut au ciel que notre guitariste ne lise ces lignes ambiguës, ce dernier est d'une intransigeance maladive en ce qui concerne l'éducation de ses filles, sans doute sous le double joug d'une éducation judéochrétienne amendée par le rigorisme de Luther et Calvin et une enfance inscrite dans une multi-fratrie au chiffre honi par les superstitieux dirigée par une main maternelle affectueuse mais ferme toute entière acquise aux principes de Françoise Dolto qui la première affirma que « d'accord l'enfant est une personne, mais ce n'est pas une raison pour se laisser déborder sur les ailes » même si ces dernières sont protectrices.

Je reviendrai peut-être dans un autre billet sur l'âme tourmentée de notre soli(psi)ste.

Nous abordâmes sobrement notre training musical par « mâle entendu », que certains d'entre nous connaissent sous le titre de « Trouduc », bien que Pascou préfère le nommer « Oublie ». C'est d'ailleurs pour cette raison qu'il entama sa partie avec l'intro de « Marre » (j'aime pas les épinards), en pensant à « Docteur Bonheur » que nous intitulons volontiers « psychotrope » à l'occasion.
Peut-être faudra-t-il un soir qu'on normalise tout ça. Là encore ça passe. Mais sur scène, ça peut faire désordre.

En parlant de scène, une perspective de concert privé semble se découper sur l'horizon des possibles musicaux. Sylvaine, la soeur de Catou, souhaite pendre sa craie maillère, vraisemblablement au début de février prochain. Nous pourrions être de l'aventure.

Forts de cette info, nous consacrâmes une bonne heure au travail sur « Oublie ». Comme d'habitude sur un titre nouveau, nous testâmes plusieurs formules. Nous dûmes la reprendre une dizaine de fois.
Bien que des progrès fussent notés, nous ne sommes pas satisfaits. Cependant comme le pied qui marque le tempo, façonne la Santiag à mesure qu'on la porte et lui imprime sa forme, nous prendrons possession de cette chanson.
Après un rapide marathon parcourant l'ensemble de nos oeuvres, nous déchiffrâmes la nouvelle production de Pierrot, dont le texte a été publié précédemment (cent balles, ou juke box).

Parmi l'éventail de versions proposées par le Leader Maximo, c'est la plus rock qui a recueilli nos suffrages (bien que j’aie eu un petit faible pour celle où le type se suicide à la fin), c'est donc celle-là que nous allons désormais développer.

En l’état, plutôt que de déchiffrage, il serait plus approprié de parler de défrichage. Et pour faire dans l’analogie bétépèsque, le chantier n’en est même pas au stade de la stabilisation du terrain : tout reste à faire.

Nous nous séparâmes à 23h17 pétantes.

* Alors que je faisais la lecture du présent compte-rendu à Odile, celle-ci m’apprit qu’il n’y avait aucun lien de parenté entre Kayak et Canoë.
Canoë a été achetée quelque part en normandie. Et Kayak n’a pas encore connu le (chien) loup.

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