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mercredi 28 mars 2007

Répète FLASH du Dimanche 25 mars, chez ALAIN

Arrivé en retard au domicile d’Alain, notre batteur, c’est avec consternation que j’ai déploré le silence monacal qui régnait dans le lieu. Comment ? me dis-je, par devers moi, autant dire en aparté : alors que j’aurais dû trouver là un groupe industrieux, tout entier concentré autour d’un arrangement à peaufiner, je ne vois que mornes musicos, avachis, désœuvrés, sans allant ni enthousiasme. Une bouteille de Feaugère traînait sur une commode, déjà au trois quarts entamée (la bouteille, pas la commode bien sûr). l’un tripotait sa baguette, l’autre caressait son manche, tandis qu’un troisième faisait des comptes.
Je m’apprêtais à les tancer vertement : dans le style « quand le chat n’est pas là, les souris dansent », mais en bon manager, j’ai préféré faire le point sur la situation et leur donner une chance de s’expliquer. Je m’interrogeais sur la forme qu’allait prendre ce débriefing.. un groupe de parole peut-être songeai-je. Et puis soudain, l’un d’entre eux a remarqué mon entrée, son œil dont jusque là l’éclat rappelait celui du merlan qui aurait voyagé un peu trop longtemps sur les chemins vicinaux du sud de la France, avant d’atterrir sur quelque étal mal glacé d’un marché clandestin près du cours Belzunce, son œil donc s’est éclairé. Un peu comme le marin, accroché à la barre sur une barque en péril, ballottée par les flots furieux, qui percevrait avec soulagement le rayon lumineux du phare dans la nuit. Je m’attendais même à ce qu’en se levant, il crie « terre, terre ».. Et alors, comme un seul homme, tous se levèrent, m’accueillant comme Abraham ramenant les tables de la loi après son pique nique sur les hauteurs du mont Sinaï.
Ce ne furent que cris de joie, embrassades, l’un d’entre eux tenta de prendre ma main pour la baiser, tandis qu’un autre touchait les pans de ma parka pour s'en frotter le front.. Mon Dieu.. me dis-je (en aparté encore je crois bien) que voilà des gens reconnaissant. Mes bons amis, les apostrophai-je. Arrêtez je vous en prie, tant d’effusions, tant de vénération. Cessez que diantre. Je les fis se relever, ils étaient si touchants. De leur babil incessant, je crus discerner que je leur avais manqué.. Hommes de peu de foi, leur répondis-je, je vous avais dis que je viendrai.. et vous doutiez. Vous étiez dans l’errance. Mais me voici ; allons mes amis ! courage, et toi, ami batteur, sers-moi donc a boire !
Il apparut, au décours de la conversation, que les préliminaires n’avaient pas été concluants, et que soit-disant, sans le chanteur, la répète n’avait pas été des plus productives. Je ne perçus là que vile flatterie bien sur, et subodorai plutôt une paresse soudaine, dont mon absence aurait pu être le prétexte. Bien entendu, je ne pipai mot, me contentant de répondre avec courtoisie à ces flagorneurs, mais n’en pensant pas moins, en aparté évidemment.
A ce propos, le lecteur averti aura remarqué que j’ai employé trois fois déjà le terme « aparté ». Ici une petite explication sémantique. Au moyen d’un peu de métalangage. Il y a plusieurs sortes d’aparté. Les deux plus connues sont : l’aparté pour chien, principalement à la viande et au riz, avec du pain dedans parfois.. et l’aparté pour chat, souvent au poisson, bien qu’en ces temps consuméristes on utilise de plus en plus des croquettes. O connaît également l’expression rugbystique « on leur a foutu l’aparté, à ces rosbifs ». Permettez moi de refermer la parenthèse.
A ce stade, et pour recentrer un peu le propos, nous étions tous au milieu des instruments, incertains. La session était déjà bien avancée, et l’envie de reprendre, un peu émoussée. Devais-je aller chercher mon matériel, que prudemment j’avais laissé dans ma fidèle 405 ? la question fit débat, tranchée heureusement par Pierre : Allez, un petit Marathon !
Et là, chers amis, ce fut soudain l’agitation d’une ruche. Nous attaquâmes bille en tête d’un whatever flamboyant, suivi par un dantesque ecolosong, puis le reste s’enfila comme les perles noires du pacifique au cou de la belle polynésienne. Un moment de pur bonheur musical.
Dois-je ajouter qu’Alain fit l’admiration de tous. Nous connaissons ses difficultés à répondre présent aux convocations du groupe. Nous passerons sur le fait que ces dernières ont un caractère quasi-obligatoire, et que toute absence doit être justifiée par un « cas de force majeure ». Jusqu’ici nous n’avons pas invoqué la cause réelle et sérieuse, ni la faute lourde, mais nous attendons tous certificats médicaux, ou documents justifiant ces absences répétées, qui nous permettront de régulariser une situation dont le flou s’accorde mal avec une gestion saine de la micro-société que constitue notre « band ». Mais foin de considérations bassement administratives, Alain est un ARTISTE, et l’indulgence doit être de mise face à un homme dont la sensibilité à fleur de peau s’accorde mal avec la rigueur d’un travail musical régulier. Du reste, sa prestation fut remarquée. Et fort de sa rythmique courageuse et volontaire, nos chansons commencent à ressembler à quelque chose, n’en déplaise à certaines spectatrices (Laura et Valérie) dont les moues dubitatives tempérées par un sourire indulgent, ne laissent pas d’altérer notre confiance dans la justesse de nos interprétations. Mais c’est ainsi, l’ARTISTE est toujours incompris dans sa propre demeure.
L’expression du talent est à ce prix, hélas.

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