Quel meilleur présage que celui d'écrire sa chronique hebdomadaire un vendredi 13 ? Un vendredi 13 avril de surcroît, printanier et auréolé par la proximité de ce 1er avril primesautier, qui cette année, assez ironiquement voit une poignée de candidats à l'investiture envahir les médias pour nous offrir leurs blagues durant une dizaine de jours encore avant que le plus comique d'entre eux nous signifie la fin de la rigolade. Heureusement d'ailleurs car leurs pitoyables diatribes, leur lamentables arguments pour nous convaincre que le politique puisse avoir une quelconque influence sur la direction du monde dans nos démocraties mondialisées me navrent profondément en ce que ce sont là des insultes manifestes à l'intelligence pourtant limitée du citoyen moyen que je suis.
On se polarise sur l'élection d'un des dix impétrants en lice, et on méconnait totalement un Leader qui pourtant exerce une influence directe sur nos vies, peut-être pas quotidiennement mais en tous cas hebdomadairement. Il s'agit de P. bien sûr dont le quinquennat se superpose à celui de notre président actuel, puisqu'Il a pris ses fonctions quelques mois en avance sur les élections de mai 2007. Sous son gouvernement éclairé notre groupe s'est développé, avec une double ligne directrice : compos et reprises. Pour le renouvellement de son mandat il n'a pourtant pas fait campagne, même si en 2012 des réformes majeures se sont mises en place : choix d'une chanson par chacun des membres du groupe et obligation de la travailler, intégration d'un nouveau musicien, et du même coup d'un instrument supplémentaire : le saxophone, déploiement du désaccordage de guitare pour interpréter certains morceaux, et surtout la mesure phare très récemment mise en place : prise en compte de la tonalité du chanteur pour jouer dans sa tessiture avec pour corollaire des tentatives remarquées de baisse générale du son des instruments pour qu'il puisse s'entendre. On déplore au final un échec, mais de taille, celui de l'enregistrement d'un CD en 2010 dont l'inachèvement pour des raisons assez floues a suscité une certaine amertume et nous a conduit il y a peu à acheter un mini studio d'enregistrement : " à faire un truc moche, autant qu'on le fasse soi-même" serait la philosophie qui a guidée ce choix !
On rappelle pour mémoire le bouleversement de 2011 qui a vu le renouvellement de la quasi-totalité de notre répertoire, et on salue l'équilibre subtil établi jusqu'alors entre compos et reprises ainsi que les régulières présentations de notre travail en concerts, avec une évolution courageuse vers des publics anonymes et donc non acquis a priori à notre groupe. Dans les perspectives d'avenir il y aurait dans les cartons l'introduction de l'accordéon dans ses versions chromatiques et diatoniques, ainsi qu'un apprentissage du violon avec toujours en filigrane l'usage des harmonicas. Une mesure passée inaperçue mais qui sécurise le groupe se matérialise par la mise à disposition d'une seconde salle de répétition, qu'on pourrait appeler l'annexe -le studio James Brown- chez notre pianiste, qui permettra d'avoir un lieu de remplacement en cas d'indisponibilité de la mythique SJM ou de fatigue de ses propriétaires.
Après les enthousiasmes parfois exagérés du début du quinquennat, les moments de doute, et les petites crises qui l'on traversées, notre microsociété s'installe désormais dans un fonctionnement régulier, basé sur la valeur travail. Les répétitions échevelées, débridées et ludiques du début ont laissé la place à des séances plus structurées et laborieuses avec depuis le début de l'année des sessions entières consacrées à un morceau unique. A ce propos si le groupe a parfois le sentiment de stagner, ou même de régresser sur l'appropriation de certains titres, il faut pondérer cette impression par le fait que les morceaux que nous mettons en chantier gagnent en difficultés et sont donc plus difficiles à finaliser avec des incursions depuis l'introduction des saxos, dans un univers plus rythme and blues dont on sait qu'il nécessite plus de rigueur dans la précision rythmique et la synchronisation des musiciens. A ce titre, je vois dans ces reprises les vertus de l'exercice, comme on fait ses gammes sur des morceaux du répertoire classique, pas forcément parce qu’on les aime mais à cause de la perfection de leur construction, et la rigueur dans l'interprétation que cela nécessite. Cela enrichit notre technique, pose des problèmes du fait de notre faible bagage technique, et nous oblige à travailler pour les résoudre, ce qui alimente à son tour notre potentiel créatif pour des compositions plus personnelles.
Quelles perspectives pour le prochain exercice ? C'est au Leader de nous le dire et de tracer la ligne claire de nos évolutions futures. Cependant à titre personnel j'aurais une requête : depuis plusieurs mois les compos sont abandonnées au profit des reprises. Il me semble que c'était pourtant à travers elles que nous marquions nos différences. Notre répertoire mélodique, avec des textes personnels au service de morceaux simples mais accrocheurs nous permettait de nous démarquer très nettement de la concurrence. Peu de groupes composent, et même si l'on ne compte plus les musiciens virtuoses qui produisent du son techniquement irréprochable, même si notre propre jeu ne sera jamais parfait et nous procure parfois des complexes, je pense qu'il faut nous appuyer sur ce que nous faisons le mieux : composer. Il est très dommage de nous priver de cet atout. Car la meilleure reprise ne sera jamais que de la conserve réchauffée au micro-ondes de talents variables. La compo à l'inverse nous est propre, elle nous définit, elle nous différencie de la centaine de groupes nîmois dont l'unique but est de satisfaire la nostalgie du public. Donner du plaisir est bien sûr louable, le donner en se faisant plaisir est encore mieux.
C'est pourquoi j'exhorte notre chef à s’investir à nouveau, avec son accordéon, son saxo ou sa cornemuse, dans le difficile travail de composition. Ce doit être Le défi de son nouveau quinquennat : donner au public, et en particulier celui de nos amis, ceux qui nous suivent, ce qu'il attend de nous : de l'originalité, de l'innovation, de la création, de l'étonnement, du rêve, du plaisir. Car que restera-t-il de nous et de notre aventure dans quelques décennies, que transmettrons-nous à notre postérité ? Quelques reprises téléchargées sur Youtube qui les feront sourire, ou bien un patrimoine musical, certes confidentiel, empreint d'amateurisme, mais qui nous appartiendra en propre et sera le reflet de ce que nous étions, de notre inventivité, de notre désir de créer et faire "comme les grands". ? Je pencherais pour la deuxième alternative, c'est en tous cas ma vision, je sais que chacun d'entre nous a une raison particulière de participer aux UFR : Simple délassement, réflexe associatif, plaisir de jouer des morceaux connus, objectif pédagogique, démarche artistique, défi technique..
Notre groupe est une auberge espagnole, les uns et les autres vont et viennent, apportent leur sensibilité, leur travail, leur créativité, leur amitié. Toutefois Il faut se garder de perdre de vue l'objectif initial, dont le cap a été fixé en octobre 2007 après que nous ayons décidé de continuer l'aventure a l'issue du concert des cinquante ans : celui de jouer et de créer ensemble et de le montrer au public. Si nous ne sommes pas attentifs à ce cahier des charges simple, nous courrons le risque de participer à une entreprise stérile, certes délassante, mais qui se videra de son sens : une machine tournant à vide et ne produisant rien.
Ainsi donc je vote pour un nouveau quinquennat, avec aux commandes notre charismatique Leader qui saura relever le défi d'une décennie musicale placée sous le signe de son génie artistique.
1 commentaire:
là si j'avais trois mains, j'applaudirai des deux premieres, et te serrerai la paluche avec la restante
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