Après notre escapade Bourguignonne, nous rentrâmes ric-rac pour nous rendre chez Phil le K.
Le séjour dans la riante cité de Montceau les Mines, ne m’avait pas été bénéfique. La nuit polaire dans une chambre à 8°, couchés sur un matelas datant d’avant guerre n’ajouta pas à notre confort, ce qui justifia sans doute ma petite méforme de début de répète.
Pourtant Phil avait fait les choses bien : galette et vodka Bison en guise de bienvenue, voilà une association originale qui ouvrait très convenablement les débats. Cependant je mis un temps certain à me mettre dans l’ambiance. Peut-être l’acoustique de la pièce y contribua-t-elle, ou bien mon état fébrile dû à un début de crêve. J’enchaînai les compos bravement mais avec un enthousiasme relatif, sans tenter de couvrir les instruments. Comme nous étions en déplacement, chacun avait amené son ampli. Les 30 watts du mien ne pouvaient rivaliser avec les trois cent watts cumulés de la concurrence, ni avec la nouvelle batterie « Ludwig » de Phil, qui trônait fièrement au milieu de salon. Je me contentai donc de faire un filage discret afin de fournir un contrepoint aux virtuoses envolée de mes compagnons. Odile de son coté ne fit guère mieux, bénéficiant pour sa part de l’ampli d’appoint de 15watts de Pierrot. Nous nous cantonnâmes dans une figuration active, ce qui nous permit d’observer que tout le monde était plutôt en place et suivait avec bonheur le tempo serré de Notre Phil à la manœuvre sur son tout nouveau bolide à percussion.
Nous tentâmes à plusieurs reprises d’affiner les réglages, mais ce fut peine perdue, nous laissâmes donc les choses en l’état durant toute la première partie de la soirée. La pause nous permit d’admirer l’assemblage de toms Ludwig Accent Combo LC125-1 de Phil, qui avec fierté nous en énuméra les éléments : Une grosse caisse de 22 pouces, dont il avait découpé un disque sur la face avant afin d’en améliorer l’acoustique, nantie à l’intérieur d’une couverture « en poils de yack » pour en assourdir les sonorités. Cinq futs munis de tout leur accastillage afin de tendre de manière optimale les peaux. Le tout en bois de tilleul, bois noble par excellence, très stable dans le temps, robuste, à la finition vernie noire irréprochable, épaulé par des cymbales Zidjian aux sonorités parfaites et au toucher incomparable. Nous étions là devant une bête de courses dont Phil le K. eût tôt fait de prendre la mesure et dresser les ardeurs. Le tout avait été commandé sur internet et livré rapidement au cabinet en plusieurs colis imposants qui nécessitèrent un déballage préalable afin de les charger dans l’Audi « pas si grande que ça » finalement. La marque Ludwig donna des idées au Leader Maximo qui évoqua un changement de nom pour notre groupe, en le rebaptisant "Ludwig Van B.".
La reprise, comme souvent d’ailleurs, fut plus souriante à notre plaisir. Je ne sais si ce fut l’influence de la chaleur ambiante du chauffage au gaz généreusement dispensé par l’installation domestique, complétée par les centaines de watts de notre sono, ou bien les vertus calorifères de la vodka Bison, toujours est-il que je me sentis plus impliqué dans les débats, d’autant qu’il s’agissait de terminer la revue de notre répertoire par les standards anglo-saxons. On dira ce qu’on voudra, mais ces anglais savent y faire en matière de Rock, et rien ne vaut un bon Jumping Jack Flash pour dissiper rapidement les nuages de la morosité, encore qu’il ne faille pas négliger le pouvoir festif d’un titre des Téléphones bien balancé par un groupe rodé pour redonner de l’entrain à une soirée en demi-teinte.
C’est amusant je regardais tantôt un documentaire sur l’unique patrouille aérienne de voltige privée : la Breitling Team. Je mentionnerai pour le coté cocardier que cette patrouille est française, composée en majorité d’anciens de la Patrouille de France. C’était passionnant. Le leader, un gars d’une petite soixantaine d’années faisait constamment références à des termes empruntés au monde de la musique. Il parlait de vol choral, d’unisson, de tempo, de scène, de spectacle, assimilant le travail en vol à un concert, dans lequel chaque partie s’accordait à l’autre. Il ajoutait que la parfaite synchronisation, et les automatismes qui résultaient de nombreuses heures en formation permettait de palier nombre de problèmes, et de se concentrer sur le travail « artistique » pour reléguer au second plan toute l’architecture technique et logistique qui le sous-tendaient.
C’est ainsi que fonctionne notre groupe. Même si tel ou tel n’est pas au sommet de sa forme, les autres, grâce aux nombreuses répétitions, ont développé suffisamment d’automatisme pour que le « vol » se passe dans les meilleures conditions, et ne laisse pas transparaître les difficultés conjoncturelles.
Ainsi notre team, un peu dans la tourmente en début de répète, aborda-t-il des cieux plus calmes qui lui permirent de se détendre. C’est dans ces moments, au cours desquels le plaisir partagé devient palpable, que les regards, jusqu’ici impersonnels, se croisent à nouveau, que la complicité s’établit, et que l’émotion s’incarne. J’eus l’impression qu’une prise de courant, oubliée depuis le début de notre réunion, venait d’être rebranchée, et que soudain une partie endormie de notre subtile et fragile machine se remettait en marche.
Cela nous permit d’entreprendre le déchiffrage du nouvel opus de Pierrot « Broq’N Rock » dans des dispositions d’esprit optimales. Je l’avais évoqué dans une chronique précédente, rapprochant l’entame du titre avec le duo de Délivrance. Il y eut une phase de « réappropriation » du duo par Jésou, qui malgré son travail acharné des jours écoulés, n’en avait pas bien encore mordu l’esprit. A la demande de la choriste, Odile, on suggéra de changer le jeu à la batterie afin qu’il soit plus dépouillé et scande mieux les phrases, puis Le Leader m’incita à chanter un ton au dessus pour dynamiser le chant. Saluons la performance de l’Ultrabassiste qui connaissait déjà sa partie et étaya admirablement l’exercice. On apprit que son séjour au ski avec Armel (le Créach) avait, grâce aux exigences de ce dernier, été très bénéfiques.
C’est au moment de se séparer que nous aurions voulu continuer, ce qui me fit penser qu’il devrait toujours y avoir une « vraie » répète juste après la première, qui nous permettrait de passer la surmultipliée et progresser à pas de Guitar Héro. Mais à la différence des groupes professionnels, chacun d’entre nous a un métier, qu’il se doit d’exercer correctement les lendemains de répètes. Nous nous quittâmes donc, plutôt satisfaits en nous donnant rendez-vous peut-être le samedi suivant à la SJM, après cette escapade buissonnières en Terres de Rouvière.
jeudi 19 février 2009
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