Avec l’expérience vient la crainte, bizarrement. Une
trentaine de concerts au compteur désormais, et de plus en plus présente est
cette angoisse qui précède le moment de se jeter dans le grand bain scénique.
Je n’ai donc pas dérogé à cette nouvelle règle de l’avant
concert, gérant tant bien que mal une inquiétude dont je sais qu’elle est sans
objet : Nous sommes bons, et puis c’est tout !
Mais quand même si l’on accepte ce préalable, reste une
incertitude : le public en est il conscient ? (...qu'on est bon ?!)
L’exercice de la scène est donc une éternelle remise en jeu
de notre titre, une confrontation directe entre nos goûts, notre technique, et
l’appréciation critique du public.
Peut-être suis-je un inquiet finalement !
On s’est pointé vers 21h, après avoir tourné un moment pour
trouver une place vers la Révolution. Mais c’est finalement au parking d’Assas
que nous avons échoué. En montant vers le lieu du concert, nous avons rencontré
Albert S. soucieux de la sorbetière industrielle à margueritas qu’il avait
installée dans l’après-midi : le granité serait il parfait ? La
titrage alcoolique correct ? La suite allait le rassurer : les
conditions avaient été réunies pour contenter les papilles et les gosiers les
plus exigeants, en qualité, mais aussi et surtout en quantité !
Il y avait déjà du monde à la rue d’Al.. : à l’entrée
du rez-de-chaussée les gens se tenaient sous un dais qui abritait l’étal de
Thibaud (excellent rôtisseur aux Halles de Nîmes). Ils dégustaient un
assortiment de sandwiches à la viande de Salers, des crevettes en beignets et
autres dips de poulet « fermier » comme le précisait fièrement le
Chef de cette baraque à frites de luxe. (sans les frites).
A l’intérieur on entendait déjà les accents New Orleans du jazz
band de notre Pierrot et ses amis frapadingues de l'impro encadrée, tout au fond de la pièce, après le saumon, la brandade,
les rillettes et l’anchoïade. Philou avait fixé à 21h le début des concerts et
les musiciens étaient pile à l’heure.
Dans la Salle Claude François, réaménagée en lieu de
réception, les habituels professionnels de la fiesta étaient au comptoir, servant à la file
les assoiffés venus écouter les cuivres vigoureux du « band ». P. se
démenait comme un diable en costard-cravate des années cinquante. A l’épaule
était passée la sangle de son mégaphone, avec lequel il haranguait la foule des
spectateurs entre deux riffs de ses acolytes (dont un JP inspiré, et un Eric
solide au banjo), sur les battements fantasques de Jérôme I. Récemment la
formation avait été complétée d’un contrebassiste dont la contribution
s’avérait très payante pour la cohésion de l’ensemble.
Leur prestation d’une heure a été très applaudie, tandis-que
je m’efforçais de ne pas répondre au chant des sirènes de la soif (Charybde, Scylla et La Belle Five), désirant
rester totalement opérationnel et au contrôle durant la partie des UFR. Il
semble que cette règle n’ait pas été totalement suivie par l’ensemble des
musiciens du groupe toutefois, car certains étaient assez joyeux au moment de
l’entame, ce qui n’a pas nui à la qualité de notre prestation.
Nous avons débuté un peu en retard sur l’horaire
initial : à 22 heures 30. Mais il fallait tout de même laisser à Pierrot
et Jean Paul le temps de récupérer un peu, et surtout de manger une bricole
avant de replonger dans l’enfer musical en changeant leur casquette de jazzmen
pour un couvre-chef plus rock’n roll.
Nous avons attaqué avec notre nouvelle reprise : Rock à la Radio. Pas trop compliqué,
texte squelettique, sans grand danger vocal : c’était parfait pour moi, et
ça permettait de mettre tout le monde dans la tonalité affichée: le Rock'n roll. Cela
ouvrait dans notre playlist ce que notre Leader à nommé « le quart d’heure
français » regroupant nos dernières reprises : Le rock à la radio
cité plus haut, mais aussi dans la foulée : Juste Une Illusion, Faut que j’me tire ailleurs. La séquence
suivante a été consacrée à plusieurs de nos compos, ce qui nous a mis, Poun et
moi, en joie. Nous aimons nos compos, et souvent nous sommes désespérés
qu’elles désertent notre playlist. Pendant que je les chantais, j’ai eu le plaisir
de voir bon nombre des gens qui nous regardaient reprendre à l’unisson nos
refrains (dont Odile et Alain nos « choristes historiques »). J’ai
éprouvé une petite fierté à surprendre de l’intérêt dans les yeux de personnes
qui n’étaient pas des assidues de nos concerts et qui visiblement appréciaient
ces créations originales.
Nous leur avons offert, pour suivre des titres croquants-craquants-fondants, généreux et malins, comme on dit dans Top-Chef, « avec
de vrais morceaux de Rolling Stones -sans glutamate- dedans » ! Un conséquent tunnel
de 5 morceaux, organisés en crescendo à partir de Love In Vain, un blues qui s’est transformé en invite à la danse
une fois que notre Philou a déclaré « que c’était un slow » et qu’il
fallait « choisir sa partenaire » !
Citons pour mémoire un difficile désaccordage des guitares
pour les deux derniers titres de ces fainéants de Rolling Stones qui pour se
simplifier la vie, et compliquer la notre, utilisent une deuxième guitare
reconfigurée dans la tonalité adéquate. Hélas, les UFR n’ont pas les mêmes
moyens, et n’ont pas un accordeur en backstage pour leur faciliter les choses.
J’ai donc meublé un peu, le temps que les détails techniques se règlent.
Au chapitre des
anecdotes aussi, une expérimentation de notre pianiste, la talentueuse
Lololalolo, qui a réussi à plaquer l’intro de « Bête de Scène » sur
« EcoloSong ». sous le regard amusé de notre Carré, qui en a vu
d’autres(et notamment de votre serviteur). C’était audacieux, mais pas
inintéressant. Une revisitation à creuser en répète en tous cas (private joke).
On citera pour mémoire ma panne de micro en fin de « Oh Les Filles »
et ma tentative a capela pour la masquer, le ballet affectueux de l’épouse du
guitariste rythmique venant régulièrement parmi nous pour le ravitailler en
boissons, (j’imagine l'ovation lors d’un concert des Stones devant 80000
personnes à Wembley) et l’entame d’un titre, commencé sans le bassiste parti
s’aérer dans l’intervalle… la routine, quoi (sourire). C’est ça les
Undertakers : de la spontanéité, de la fraîcheur et le sentiment qu’à
chaque instant TOUT peut arriver !
Cependant les gens n’étaient pas venus pour voir un concert
des Fossoyeurs, mais pour honorer la naissance de notre Philou, ainsi des
impératifs de timing se faisaient de plus en plus insistants, nous appelant à
réduire notre concert - Je me suis même laissé dire que du coté de certains
organisateurs, on aurait vu d’un bon œil que nous ne jouions que quatre titre
avant de céder la placer à d’autres célébrations – Aussi dès le treizième titre
on venait me voir au micro pour que j’abrège. Mais je ne pouvais pas : Le
quinzième morceau était celui de notre Philou !
J’ai eu le plaisir de l’appeler au micro, et il nous a régalés
d’une remarquable interprétation de Toute
la Musique Que J’Aime. De l’avis général « c’était bien mieux que
Johnny ! »
De nouvelles maîtresses de cérémonie se sont illico saisies
du micro pour dire un très joli compliment qui tournait autour de ce que
préférait Philou (la pèche plutôt que la chasse, la corrida plutôt que la
course camarguaise, le champagne au pastis, le week-end à la semaine…). Pour
corser la prestation, un facétieux dans l’ombre modifiait le son de leur voix à
la volée. J’ai beaucoup aimé la partie où Catherine faisait son envoi avec une
voix de canard : ça donnait un sel particulier à son inventaire. Ce moment
drôle, et empreint d’émotions devant un Philou sous le charme a ouvert la série
des cadeaux que notre hôte à déballés fébrilement. On nota une tête de taureau
en patchwork très originale.
Ce moment de répit nous permit de recharger les accus pour
interpréter quelques morceaux supplémentaires à la demande de Philou. Cela nous
permit une très longue interprétation de Stand By Me, que nous dûmes faire
durer une dizaine de minutes afin de permettre aux nombreux couples de
« conclure » en dansant. Nous avons terminé notre set par Oh les Filles, qui me permit de revisiter l’avant dernier
couplet, remplaçant les amours avec Marcel par une relation avec Philou : Je suis sorti avec Philou, Près des arènes
on s’est rencontré, il habite tout près d’la Révo, alors je l’ai raccompagné,
arrivé d’vant son HLM…. (là il a un peu tiqué) il m’a dit… vous connaissez la suite.
Je n’ai pas regardé l’heure, mais nous avons dû jouer deux
heures. Si on compte le concert des jazzmen, P. et JP. ont donc fourni leur
plus longue prestation musicale « de tous les temps ».
Philou nous a remerciés, je crois qu’il était content de
notre contribution. Plein de gens sont venus me voir après le concert pour me
dire leur plaisir, et même Le Carré nous accordé un satisfecit : « c’était
pas mal » a-t-il déclaré avec un petit sourire. Pour moi ça vaut toutes
les palmes et médailles !
Pour maintenir l’ambiance festive, Hub nous a amené jusqu’à
plus de 4 heures du mat. grâce à la discothèque de son Iphone pluggé sur notre
sono. Je me souviens que vers la fin nous avons dansé sur Tata Yoyo repris 4
fois en boucle. Hub nous a avoué que ce n’était pas une démarche artistique,
mais qu’il avait perdu ses lunettes et qu’il avait du mal à sélectionner les
titres sur l’écran de son smartphone !
Enfin un dernier flash mémoriel pour évoquer, entre deux Jet27 "de l'amitié", une longue séquence de polyphonie corse avec la main en coquille sur l'oreille et une expression de profonde communion avec les Forces de l'Ether (ou de l'alcool, au bout d'un moment je n'arrive pas bien à faire la différence), en compagnie de notre Sax Symbol. Cher J.P. je me souviens que notre harmonie était parfaite, nous en avons convenu avec la plus profonde conviction, comme seuls peuvent en convenir deux allumés très "corne passée" à 4h du matin, cependant je ne peux me rappeler le titre qui passait à ce moment : Le lac du Connemara peut-être ? Je sais que nous nous étions rebaptisés I Muvritaker, ou I Undervrini.
Le dernier carré s’est séparé vers 4h30. Soirée réussie pour
nous, dont nous espérons qu’elle l’a été tout autant pour les quatre-vingt
participants, et surtout pour l’organisateur de l’évènement : Philou.