Le Samedi 13 dernier, Odile se sacrifia en restant seule à la maison. Pourtant une journée au Pin chez les KreaX est toujours un évènement majeur dans la vie des UFR. Cependant nous devions être 13 à table. Treize à table, pour un samedi treize, autant dire quasiment un vendredi -un vendredi dièse- c’était trop tenter le destin. Cette perspective hautement paranormale associée à des problèmes articulaires majeurs eut raison de la volonté d’Odile.
Je me rendis donc seul dans ma studiomobile au rendez vous musico-gastronomique des UFR et des Narbonnais en leur terre familiale près de Connaux. C’est toujours un petit exploit d’arriver sans encombres à destination, tant le Mas Palisse se tapit au milieu des terres, dans un écrin de verdure qui le cache aux importuns. Bien sûr il reste les indications précieuses : « tu traverses Connaux en tournant à gauche sur la nationale de Bagnols, puis sur la route du Pin tu ne prends pas le petit pont au rond point, mais tu files à gauche, et puis ça serpente et là tu laisses à droite la rambarde en faux bois et les tables de camping, et juste après le calvaire c’est à droite avant d’arriver au Pin, et ça serpente sur chemin goudronné puis rapidement en terre où tu prends la deuxième à droite et là tu demandes à l’autochtone mais surtout tu l’écoutes d’une oreille distraite sinon il t’envoie dans le potager de la voisine». Mais je n’eus pas trop d’un logiciel de navigation, de cartes IGN et de mon intuition masculine pour parvenir à bon port.
On se retrouva pour un apéro sur la terrasse surplombant les toits de tuiles du hameau. Le temps était radieux et agréable, avec cette lumière si particulière du lieu que j’ai déjà décrite lors d’une précédente visite.
Après avoir dénombré l’assistance je constatai que les Charras manquaient à l’appel, ainsi que la pianiste notre Lololalolo. Pierrot n’avait pu intervertir son week-end de garde et Lolo préparait sa semaine de thalasso à Hendaye.
Il est vrai que prévoir tout le nécessaire du parfait body-curiste pour une semaine entière n’est pas une mince affaire : choisir les maillots pour les enrobages d’algues, les strings pour les bains de boue, les paréos pour nouer juste au bon endroit sur le bas des hanches ou croiser afin qu’ils drapent agréablement les seins en les séparant de manière harmonieuse, sélectionner les robes et costumes de cocktails, les lingeries affriolantes, les nuisettes ajourées pour les retour de boite, ainsi que tout ce qui révèle, rehausse et met en valeur la beauté des corps.. Voilà qui nécessitait une concentration incompatible avec des exercices de répétition.
Les Rollin quant à eux étaient pris par un repas familial. Heureusement que les vrais, les purs, avaient répondu présent : Le Carré et sa moitié, la femme à Barde et son double, L’Ultraschtroumpfiste et sa schtroumpfette, et les Simon et Garfunkel des duos approximatifs, le Philou et moi-même.
Cependant Le KreaX en aparté me confia son désarroi, sa déception : « Lolo et Odile, je comprends et j’excuse, commenta-t-il, mais le Pierrot et Les Rollin, ne sont plus mes amis. Je ne veux plus qu’on prononce leur nom en ma présence, ou qu’on évoque leur souvenir ; et leur nom sera effacé des frontons des édifices publics et toute référence à leur existence sera rayée des états civils, des registres des églises et des serveurs de FaceBook. Qu’il en soit ainsi pour les siècles des siècles jusqu’à la douzième génération », conclut-il sombrement.
Auparavant, mal aiguillé par un frère facétieux de notre hôte, j’avais atterri au volant de ma 107 quasiment dans la cuisine de Régine la belle sœur, après un gymkhana hésitant à travers les arbres, à la surprise indignée de cette dernière. Heureusement le KreaX me remit dans le droit chemin, et tandis que les participants arrivaient, nous aida à installer le matos dans la salle de répète.
Le plat principal de midi était un cassoulet confié aux soins de la belle sœur Régine évoquée plus haut, dont la maison mitoyenne abritait un appartement meublé avec beaucoup de goût dans un style très cosy et une cuisine équipée d’un four de bonnes dimensions pour accueillir deux marmites. Des tableaux ornaient les murs, qui permirent à notre esthète Philou de prendre langue et d’engager une conversation où l’art le disputa aux mondanités, exercice dans lequel notre ami excelle, tant sa parfaite insertion dans le tissu social nîmois et son entre-gens associés à un carnet d’adresses démesuré lui sont un sésame aisé dans la recherche de points communs propice à un dialogue constructif.
Après avoir admiré les lieux, nous l’abandonnâmes avec son hôtesse. De leur joyeux marivaudage, je crus comprendre qu’elle était déjà sous le charme et allait sous peu lui confier la gestion de son parc immobilier azuréen avec peut être en prime le don d’un des tableaux pour sceller cette collaboration nouvelle.
Alors que nous nous mettions à table prêts à en découdre avec l'apétissant cassoulet de Anne, nous fûmes rejoints par les Fabre vers 14h. Sylvie sauve des clients de la faillite personnelle toute la semaine, samedi matin inclut, ce qui justifia ce retard du couple des Clématites. Outre l’excellent cassoulet, nous eûmes en entrée une salade au foie gras et aux grattons et nous conclûmes ce repas du sud ouest par des desserts au chocolat et aux noix ainsi que des cannelés.
Philou bénéficia en outre d’une attention toute particulière puisqu’il eut droit à une assiette entière de girolles préparée à son unique attention. Sans doute nos hôtes peu au fait de nos goûts alimentaires avaient-ils fait le choix de tester ces friandises forestières sur le plus robuste d’entre nous, craignant peut être une allergie dommageable à nos constitutions fragiles.
L’après midi était déjà bien avancé, mais nous décidâmes de faire un peu d’exercice. Cette ballade serpentait à travers les vallons et les vignes sous les rayons progressivement rasant du soleil d’automne qui éclairaient en tangences les frondaisons amaigries aux tons fauves et les ceps porteurs encore de quelques grappes oubliées de raisins chétifs et aigrelets.
On parvint sur les rives d’un cours d’eau qui coupait le chemin. Le courant n’était pas très puissant, mais malgré sa faible profondeur il empêchait de traverser facilement à guet. Le KreaX jeta en travers des troncs et des branches de faibles sections dont la fragilité n’inspirait qu’une confiance relative. Je me réfugiai derrière l’objectif de mon photophone afin d’observer l’évolution des évènements. Chacun emprunta la voix qui lui sembla la plus sure, au grès de ses capacités physique et de son inspiration. Certains furent plus chanceux que d’autres qui durent parfois mettre un ou deux pieds dans l’eau et jusqu’à une demi-fesse pour la plus téméraire, pour aider au franchissement. J’eus le souvenir de ce film assez angoissant : Délivrance, et craignis un instant que notre petite promenade se transforme en cauchemar.
Je jetai quelques regards prudents alentours, tentant de déceler parmi les arbres quelques indigènes mal dégrossis prêts à fondre sur les citadins sans défense que nous étions. Mais nous pûmes poursuivre notre pérégrination sans plus d’encombres, avec une bonne humeur intacte d’autant que sur les bords du chemin le Carré découvrit une coulée de girolles que les filles cueillirent, tout à la joie de cette manne inattendue. J’assurai nos amis que point n’était besoin désormais de prendre des précautions avec nos estomacs en sacrifiant celui de Philippe : nous supportions sans problème l’ingestion de tout champignon comestible, fut-ce une vulgaire girolle ; nous pouvions les partager avec lui !
Au retour, après le goûter, nous allâmes dans la salle de répétition afin de faire un petit marathon musical. Bien sûr l’absence du Leader se fit sentir, surtout sur le répertoire des UFR, bien qu’on ait laissé de coté « Alabama », « le Cochon », « Antisocial » ou « Ma Caisse », mais le KreaX tira son épingle du jeu dans les impros à la guitare ou au piano avec cette maestria que nous lui connaissons et quelques bonnes phrases musicales émergèrent régulièrement avec bonheur de nos exercices.
Je notai que de toutes les répètes déjà accueillies en ces lieux, c’était la plus aboutie sur un plan sonore. Pour une fois on ne versa pas dans la cacophonie destructrice de tympans, le niveau acoustique resta relativement modeste. Je m’en rendis compte au fait que mon ampli suffit très largement à sonoriser ma voix qui pratiquement jamais ne fut couverte par les instruments. Un grand satisfecit donc sur ce plan qui nous permit d’aborder le cassoulet vespéral dans les meilleures conditions.
Nous finîmes « les restes » avec entrain, avant de nous séparer sur la fin de soirée avec le sentiment du devoir accompli, pour un excellent cru 2010 de ces « Répètes au Pin » qui prennent désormais des allures d’institution.
samedi 20 novembre 2010
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4 commentaires:
Le texte est magnifique ! J'étais dans les bois avec vous, sautant allègrement le ruisseau et lors du repas, j'ai même senti le fumet délicat des haricots blancs.
Michel ! Tu es un narrateur hors pair, possédant une érudition époustouflante, digne d'être le nègre de d'Ormesson...
SD
Sourire, c'est gentil ma SD.. Concernant ma négritude, je te rappelle que je suis né en Côte d'Ivoire et qu'à ce titre si je présente à l'exterieur des traits et un teint incontestablement européens, par contre en dedans je suis d'une rare et sombre noirceur. Mon écriture s'en ressent !
Mazette !!!! -sans jeu de mots-
Je ne savais pas que tu étais un AFRRRRRRRICAIN.......Il faudra que je regarde d'un peu plus près car, en général, les Africains ont de belles fesses. Donc la prochaine fois que l'on se voit.....
sd
P.S : aucune connotation sexuelle dans mon précédent commentaire. Juste une réflexion d'esthète.
Sd
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